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0391 Serindia : vol.3
Serindia : vol.3 / Page 391 (Color Image)

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doi: 10.20676/00000183
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Part Hi]   LES MANDALAS   I42I

caractère assez différent du style chinois de l'époque des Tang, et cette même expression du visage qui rappelle l'art des Wei du Nord. Elle constitue un mandala à ordonnance réduite d'un Avalokiteçvara en Padmacintàmani. Â droite et à gauche, les uns au-dessus des autres, siègent huit Bodhisattvas. Des inscriptions tibétaines sont lisibles seulement pour les quatre Bodhisattvas de la partie centrale de la peinture. Elles nous permettent d'identifier, à gauche de la figure centrale, Sarvanivaranavishkambhi ; comme pendant, à sa droite, Kshitigarbha. Puis, au-dessous, à gauche, Samantabhadra ; à droite, Manjuçri. Les deux Bodhisattvas du haut et les deux Bodhisattvas du bas restent indéterminés. Nous retrouvons, en tout cas, Manjuçri et Samantabhadra comme assistants d'Avalokiteçvara et les peintures sino-tibétaines viennent donc confirmer les données de la peinture chinoise Ch. 1v. 0023 (7'h. B., PI. XVI). Elles identifient, d'autre part, deux autres assistants parmi lesquels il est intéressant de trouver un Kshitigarbha sous son apparence traditionnelle, tibétaine ou chinoise, la tiare en tête, et non sous l'aspect du moine, comme nous le verrons tout à l'heure, dans ses ,mandalas.

Enfin, une dernière peinture (Ch. lii. coi ; Th. B., Pl. XXXI) franchement tibétaine, au moins si l'on s'en rapporte à son style, mérite d'être rapprochée du grand mandala dans lequel on voyait Bhaishajyaguru présider au Paradis d'Avalokiteçvara. C'est une peinture montée à la tibétaine, de style purement lamatque, et, du reste, peinte comme les peintures tibétaines modernes, à la détrempe, sur toile. Les figures n'ont pas encore ces déhanchements violents, la composition n'a pas cette surcharge barbare des peintures tibétaines telles que nous les avons connues jusqu'ici. Elles sont cependant bien peu chinoises, et sont surtout indiennes de style. Déjà on y voit apparaître des mouvements accusés et, surtout, cette tendance à contourner les formes secondaires en ornements flexueux, qui est le propre de l'art tibétain tout entier. Au mélange de style indien et de style chinois que nous offraient ces peintures désignées par moi sous l'épithète sino-tibétaine, celle-ci oppose une tradition plus indienne — je dirai même hindouiste dans laquelle on voit s'annoncer cette danse échevelée des corps, cette déformation systématique qui vont devenir la marque de fabrique des poncifs religieux de la peinture tibétaine.

Le mandala est consacré à Avalokiteçvara, ou plutôt à cette forme du Bodhisattva de Miséricorde à laquelle on a donné le nom de Padmapàni. Au milieu d'une auréole divisée transversalement par des bandes de couleurs vives, un nimbe circulaire derrière la tête, siège Padmapàni, un lotus jaillissant de chaque main. Tout en haut, nous retrouvons le Buddha de Médecine, Bhaishajyaguru, entre deux lamas à bonnet jaune. A la gauche de la figure centrale, on voit, du haut en bas, Avalokiteçvara blanc au flacon ; Avalokiteçvara jaune au flacon et à la fleur de lotus ; Avalokiteçvara noir à la fleur de lotus ; Avalokiteçvara brun au flacon et à la fleur de lotus.

A gauche on voit, du haut en bas : un Avalokiteçvara bleu au flacon et à la fleur de lotus ; un Avalokiteçvara jaune au flacon et à la fleur de lotus ; un Avalokiteçvara rouge au flacon et à la fleur de lotus ; un Avalokiteçvara au flacon et à la fleur de lotus.

Enfin, au milieu et en bas, une figure tantrique : la Çridevi bleue sur le cheval sellé de peau humaine.

Dans l'intervalle réservé entre chacun des Avalokiteçvara qui assistent Padmapàni, on voit la représentation d'un des miracles de Kouan-yin. Nous avons vu à- propos de la peinture Ch. xl. oo8 (Th. .B., Pl. XXII) que toutes ces scènes se rapportent à des passages du Saddlaarmapundarzka-satra. Il est donc inutile de revenir sur ce sujet. Mais ces scènes nous permettent de définir le mandala d'une façon plus précise : c'est un mandala de la Kouan-yin aux miracles.

Si cette peinture vient nous confirmer le lien établi dans l'iconographie entre Bhaishajyaguru et Avalokiteçvara, si elle vient mêler à cette figuration la représentation des miracles du Bodhisattva de Miséricorde ; si, enfin, elle confirme les données précédemment acquises en nous montrant AvalokiteçvaraPadmapàni assisté par lui-même, elle vient ajouter quelque chose de plus à tout ce que notre étude nous a appris jusqu'ici.

De la description faite, le lecteur aura déjà conclu à l'allure purement tibétaine de cette peinture. Comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire à propos des peintures de Touen-houang, celles-ci ne sont pas postérieures au x° siècle. Dès lors, je pense bien que le mandala tibétain de Padmapàni, avec sa Çridevi si caractéristique et ses deux lamas à bonnet jaune, assistants de Bhaishajyaguru, représente la première manifestation iconographique aujourd'hui connue du bouddhisme lamatque. Autre chose est une inscription tibétaine à côté d'une inscription chinoise, sur une peinture de style très particulier et désormais aboli ; autre chose est une composition aussi précise, répétée jusqu'à notre époque, avec un caractère si tranché et si franchement tibétain. On a ici un monument incontestable et incontestablement le plus ancien de l'art proprement dit lamatque.