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0013 La Vie du Bouddha : vol.1
La Vie du Bouddha : vol.1 / Page 13 (Color Image)

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doi: 10.20676/00000286
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INTRODUCTION   I I

bref, ne chercher dans la légende bouddhique qu'un prétexte à composer un herbier de la flore mythique du bassin du Gange ? Le résultat ne manque assurément pas d'intérêt ; mais c'est se condamner d'avance à ignorer la véritable essence du géant de la forêt qui porte sans faiblir, comme un royal manteau, ce mouvant réseau de végétations parasites. Veut-on au contraire percer cette énigme ? Il faudra procéder tout autrement, porter résolument la hache dans ce rideau de fictions légendaires qui ont escaladé jusqu'au faîte et recouvert de pied en cap la personnalité historique qui leur sert de support ; mais quand on aura tout abattu et saccagé alentour, n'est-il pas à craindre qu'on ne découvre que l'arbre central est mort depuis longtemps, épuisé de sève par ses greffons étrangers et étouffé sous l'exubérance des plantes adventices ? Si bien que le critique serait ou devrait être le premier à regretter, devant le squelette décharné ainsi remis au jour, la triomphante parure dont il a pris à tâche de le dépouiller.

Comme champion des historiographes qui ont tenté de dégager sous le prolixe revêtement des mythes la sèche armature de l'histoire, on peut placer au premier rang Hermann Oldenberg, dont le beau livre a été traduit en français et en anglais. Pour trouver le plus brillant des mythographes, il n'est pas besoin de sortir de France où, dès I873-I875, Emile Senart publia dans le Journal Asiatique la première monographie scientifique de la légende du Bouddha. A prendre sa thèse dans toute sa rigueur et sans tenir compte des notables atténuations que la seconde édition de l'ouvrage y apporte, le Bouddha ne serait plus un personnage historique, à peine une entité, un postulat, un prétexte à cristalliser autour de soi tout un ensemble de récits mythiques ; et ces récits, familiers à toutes nos mythologies indo-européennes, aussi bien grecque que germanique ou iranienne, se rapporteraient uniformément aux merveilleuses aventures du héros solaire. A peine est-il né que sa mère Mâyâ, pareille aux vapeurs matinales, disparaît devant le rayonnement de son fils. Il poursuit sa carrière, triomphe de l'obscure armée des démons, fait tourner au zénith la « roue de sa loi », simple transposition de son disque aux mille rais. Mais bientôt il penche vers son déclin et disparaît dans l'Occident incendié de ses derniers rayons comme sur un bûcher gigantesque.

Émile Senart ne tarda pas à reconnaître qu'il avait eu tort « en paraissant donner trop de crédit au système d'interprétation » que l'école de mythologie comparée, dans l'enivrement de ses débuts, avait mis à la mode. On sait à quel point on en est revenu depuis, quand on s'est aperçu que la théorie du mythe solaire était une clef à toutes portes et une selle à tous chevaux. Avec quelle aisance n'a-t-on pas pu, par exemple, accommoder à cette sauce la biographie de Napoléon et nous le montrer naissant dans une île de la mer (c'est la Corse), embrasant l'Orient des