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0040 La Vie du Bouddha : vol.1
La Vie du Bouddha : vol.1 / Page 40 (Color Image)

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doi: 10.20676/00000286
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38   LE CYCLE DE KAPILAVASTOU

chasse-mouches contre les moustiques, veillent sur le sommeil de leur maîtresse, et au-dessus de leurs têtes flotte la vision matérialisée de l'éléphanteau divin. Il n'y a qu'un malheur, c'est que celui-ci est beaucoup plus gros que sa future mère, et que la reine lui présente le flanc gauche, alors qu'il est écrit qu'il n'est entré (et sorti) que par son flanc droit — et même qu'en sa qualité de progéniture mâle, il n'a jamais résidé que dans la partie droite de son sein. Les artistes d'Amarâvatî, plus soucieux de la vraisemblance, donnent au pachyderme des dimensions minuscules ; et, encore plus dociles aux dires de leurs donateurs, ceux du Gandhâra couchent la reine sur son côté gauche : mais tous, chacun dans son style, traitent visiblement le même sujet ; et ce sujet, pour que nul n'en ignore, le vieux sculpteur de Barhut a pris soin de l'inscrire au-dessus de son médaillon de sa plus belle écriture : « Bhagavato okranti : la descente du Bienheureux ». Aucun doute n'est donc permis : il s'agit bien d'une représentation concrète de la « Conception » du futur Bouddha : et cette image a été répétée à tous les coins et par toutes les écoles de l'Inde. Il n'en faut pas davantage pour faire deviner ce qui ne pouvait manquer d'arriver : l'imagination populaire, toujours simpliste, a pris à la lettre l'inscription catégorique du vieil imagier et cru, comme on dit, « que c'était arrivé- ». Aussi bien le croyait-il lui-même ; car le geste de surprise esquissé sous son ciseau par l'une des femmes qui veillent la reine prouve que, dans les idées de l'artiste, la vision de l'éléphant n'était pas seulement un rêve de la dormeuse. L'inévitable confusion était donc faite dans les esprits dès le IIe siècle avant notre ère, et des esprits elle a forcément passé dans les textes. Ce qui était originairement et est resté dans la tradition pâli comme dans les stances du Lalitavistara un songe prémonitoire, présage et symbole de la Conception — bref, une sorte d'Annonciation conçue à la mode indienne — a fini par devenir dans la prose du Lalita-vistara comme dans le Mahâvastou un épisode réel de la biographie de Çâkya-mouni ; et bientôt même il sera érigé en loi générale que jamais Bouddha du passé ou de l'avenir n'est entré et n'entrera dans le sein de sa mère autrement que sous la forme d'un éléphant blanc.

L'examen des sculptures ne nous aide pas seulement à sortir de l'embarras où nous jetaient les contradictions des textes : il attire notre attention sur un point qui, psychologiquement, ne manque pas d'importance. On ne peut en effet s'empêcher de remarquer qu'au moment décisif de la conception, Mâyâ nous est toujours représentée sur sa couche solitaire. A Barhut elle n'a autour d'elle que ses femmes ; au Gandhâra, des amazones montent en outre la garde dans les vestibules, appuyées sur leur lance ; et à Amarâvatî les quatre dieux gardiens des quatre points cardinaux font de même, l'épée à la main, aux quatre coins du bas-relief : toujours et partout l'époux est absent. Or ce n'est sûrement pas par pudibonderie que les artistes indo-grecs laissent