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0058 La Vie du Bouddha : vol.1
La Vie du Bouddha : vol.1 / Page 58 (Color Image)

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doi: 10.20676/00000286
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56   LE CYCLE DE KAPILAVASTOU

pressent de prévenir son hommage par les leurs. Si elles se prosternent devant lui, ainsi qu'il convient, c'est pour se redresser aussitôt et reprendre sur leurs autels leurs places accoutumées : car le Prédestiné est « venu comme il est venu » aussi bien pour le salut des dieux que pour celui des humains. Ainsi l'on s'aperçoit que les deux passages cités ne diffèrent pas moins dans leur esprit que dans leur lettre. C'est indépendamment l'un de l'autre que leurs auteurs ont projeté dans le passé, chacun en conformité avec ses propres croyances religieuses, la préfiguration d'événements en voie de s'accomplir sous leurs yeux. Le contraste entre les deux légendes s'accentue encore plus nettement si l'on poursuit leurs prolongements à travers les représentations qu'en donnent les iconographies médiévales. Le miracle chrétien reparaît en effet dans toutes les séries peintes ou sculptées consacrées aux scènes de l'Enfance, et le xIiie siècle a fini par le figurer de façon presque hiéroglyphique, par deux idoles tombant de leur piédestal et se brisant irrémédiablement par le milieu. Lorsque au vile siècle — une douzaine de siècles également après le Bouddha — le pèlerin chinois Hivan-tsang visita, en dehors de la porte de Kapilavastou, le temple qui était censé avoir été le théâtre du miracle bouddhique, il eut sous les yeux un spectacle bien différent. Quand, relate-t-il, lors du retour du jardin de Loumbinî, le Bodhisattva, encore dans ses langes, fut apporté dans le temple, la statue se leva pour lui rendre hommage et elle se rassit quand on l'emporta ; et c'est pourquoi l'on voit dans ce temple une image de pierre dans l'attitude de quelqu'un qui se lève pour saluer. Les vieux imagiers de l'Inde comme ceux de nos cathédrales avaient parfaitement saisi et traduit aux yeux le sens intime de leur propre tradition.

La comparaison des deux textes appellerait encore bien d'autres remarques. Le scénario du miracle dans l'Évangile apocryphe trahit une insigne maladresse dans sa recherche de la vraisemblance historique ; mais, en revanche, si l'on se demande où l'épisode s'introduit le plus naturellement, il n'est pas douteux que ce ne soit dans la légende judéo-chrétienne. L'invention de la chute des idoles égyptiennes est visiblement sortie de la parole prophétique d'Isaïe qu'il s'agissait de réaliser à tout prix, et plonge par ses racines dans le passé hébraïque ; nous n'avons rien à chercher au delà. Devant le texte sanskrit, tout au contraire, nous n'arrivons pas au bout de nos étonnements. La justification que le rédacteur croit devoir nous donner en fin de chapitre de cette précoce exhibition par le Bodhisattva de sa puissance surnaturelle, même si l'on fait abstraction de l'extravagance des chiffres, est trop édifiante pour être convaincante, et se répète d'ailleurs en d'autres occasions. Par ailleurs, à la surprise d'entendre un bouddhiste nous parler d'une « présentation au temple » du futur Bouddha, s'ajoute celle d'en lire une description qui correspond trop bien à notre propre façon de concevoir les