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0115 La Vie du Bouddha : vol.1
La Vie du Bouddha : vol.1 / Page 115 (Color Image)

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doi: 10.20676/00000286
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LA QUfTE DE L'ILLUMINATION   I13

Et il fut fils, selon leurs dires, d'un de leurs rois, grand et riche. Et il fut de si bonne vie qu'il ne voulut onques rien entendre aux choses mondaines, ni ne voulut être roi. Et quand son père vit qu'il ne voulait être roi ni ne voulait à nulle chose entendre, si en eut moult grande ire et l'assaillit avec de grandes promesses. Mais il n'en voulait rien, si que le père en avait moult grande douleur, et d'autre part aussi pour ce qu'il n'avait nul autre fils que lui, à qui il pût laisser son royaume après sa mort. Si pensa le roi et fit faire un grand palais, et céans fit mettre son fils, et le faisait servir par moult de pucelles, les plus belles qu'il pouvait onques trouver. Et leur commanda qu'elles jouassent avec lui tout jour et toute nuit, et qu'elles

chantassent et dansassent devant lui, de telle sorte que son coeur se pût laisser aller à l'attrait des choses humaines. Mais tout cela n'y valait rien :

car il disait qu'il voulait aller chercher celui qui ne mourra jamais, et qu'il

voyait bien que chacun en ce monde devait mourir, ou jeune ou vieux. Si ne fit autre chose une nuit fors que privément se partit du palais et s'en

alla aux grandes montagnes et moult dévoyables. Et là demeura moult honnêtement et moult menait âpre vie, et fit moult grande abstinence, tout comme s'il eût été chrétien ; car s'il l'eût été, il serait un grand saint avec N.-S. Jésus-Christ, vu la bonne et honnête vie qu'il mena...

On ne saurait dire mieux ; - et, par le fait, le grand voyageur ne croyait pas si bien dire. Un saint de l'église chrétienne, le Bodhisattva l'est bel et bien devenu deux siècles et demi plus tard sous le nom de Josaphat quand, sur l'autorité du pieux roman du Syrien Jean Damascène, le pape Sixte-Quint l'inscrivit au martyrologe romain à la date du 27 novembre.

LA TRANSFORMATION DU LAÏQUE EN MOINE. - C'est dans cet esprit de large sympathie qu'il convient de poursuivre l'étude de la vie du Bouddha, et il est sans doute intéressant de le sentir si proche de nous sous tant de faces : encore ne peut-on pas oublier que vingt-cinq siècles et un quart de la circonférence terrestre nous séparent. Les traits sur lesquels il nous faut désormais insister sont ceux qui, brochés sur cette trame universellement humaine, lui restituent son aspect spécifiquement indien. Reconnaissons-le pour commencer : la fuite du Bodhisattva témoigne d'un réel courage et d'une force morale peu ordinaire ; car ce qui l'attend au bout de son dernier galop, ce n'est rien moins, et il le sait, qu'une véritable mort civile. Etrange contrée que l'Inde : si nous en croyons les statistiques, il n'en est pas où le commerce des aphrodisiaques soit plus développé, et il n'en est pas non plus qui témoigne vénération plus grande pour ceux qui font profession du voeu de chasteté ; on n'y entend perpétuellement parler autour de soi que de roupies, et il n'est pas de pays où le pauvreté volontaire soit plus hautement respectée. A l'heure actuelle la grande péninsule ne nourrirait pas bénévolement moins de

six millions d'ascètes vagabonds et mendiants. Sâdhou ou « gens de bien », comme les appellent les Hindous (et il semble que la

majorité d'entre eux mérite ce titre), fakir ou « pauvres », comme

les dénomment ;les musulmans, ils représentent les Cramana d'autrefois. Des plus ambiguës est à nos yeux la condition de ces

chemineaux religieux. Une profonde déférence les entoure ; on se-fait mérite de les nourrir, devoir de les consulter, gloire de sui-

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