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0134 La Vie du Bouddha : vol.1
La Vie du Bouddha : vol.1 / Page 134 (Color Image)

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doi: 10.20676/00000286
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132   LE CYCLE DU MAGADHA ET DE BÉNAR ÉS

en darçana — ce mot qu'on traduit abusivement par « système philosophique » et qui signifie proprement une « visée », ou comme nous dirions, en nous servant d'une métaphore analogue, une « avenue » du salut. Son metteur en forme brahmanique, Patanjali, en a fait une sorte de propédeutique psycho-physiologique à l'usage des intellectuels indiens, sans distinction de credo, et, pour le rendre plus acceptable à tous, il l'a même couronné d'une théodicée à tout le moins inattendue. Mais sous ce déguisement scolastique, son caractère occultiste et magique continue à transparaître et force à reconnaître originairement en lui un fond préhistorique de sorcellerie tant blanche que noire. Purifié et systématisé par des générations de penseurs, il continue à représenter en face de l'exégèse ritualiste du Véda brahmanique la technique rivale de l'ascétisme des çramanes et à promettre à ses initiés, qu'ils s'en soucient ou non, l'acquisition des cinq facultés surnaturelles, à savoir le pouvoir de se mouvoir et de changer de forme à volonté, de voir et d'entendre à distance, de lire dans la pensée d'autrui et de se souvenir de ses naissances antérieures. A raison de son antiquité, on le trouve présent au berceau de toutes les sectes hindoues. Ainsi que l'a magistralement démontré Emile Senart, il a notamment exercé sur le bouddhisme naissant une influence considérable. La communauté des fils spirituels du Çâkya n'attribue pas seulement à son Maître et à ses saints les pouvoirs magiques que nous venons d'énumérer : elle a encore emprunté au Yoga le principal de ses exercices spirituels, nous voulons dire la concentration d'esprit obtenue par une méditation à caractère de plus en plus extatique, avec tous les détails et les termes techniques de ses stades successifs. Or c'est justement sur de telles pratiques que roulait l'enseignement donné par Roudraka à ses nombreux disciples ; et si l'on passe condamnation sur lui, c'est uniquement parce que ses méditations étaient encore « mondaines » et par conséquent de qualité inférieure. La curieuse histoire qu'a recueillie sur son compte Hivan-tsang fait également de lui un pratiquant de la méditation doué des pouvoirs magiques, mais encore sujet aux tentations des sens. Bref, tout ce que la tradition bouddhique reproche au second maître du Bodhisattva, c'est d'avoir été un yogui médiocre et faillible : mais par là même elle reconnaît en lui un adepte du Yoga. Et voilà le second précepteur classé professionnellement tout comme le premier.

Mais, objectera-t-oh peut-être, on ne saurait passer sous silence le désaccord flagrant qui va se marquer dès le début entre le Yoga et le bouddhisme. Les yogui et avec eux la plupart des Indiens voyaient dans les macérations un moyen assuré d'obtenir non seulement des facultés, mais encore des révélations surnaturelles. Or, sur ce point capital, le Bodhisattva n'est plus censé perfectionner l'enseignement reçu de ses maîtres ; il prend nettement position d'opposant et rompt en visière avec la tyrannie de