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0206 La Vie du Bouddha : vol.1
La Vie du Bouddha : vol.1 / Page 206 (Color Image)

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doi: 10.20676/00000286
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204   LE CYCLE DU MAGADHA ET DE B NARÈS

grand mérite. Visiblement leur ancien condisciple, devenu leur Maître, a paré au plus pressé. Il s'est hâté de leur indiquer le chemin tout frais frayé de la « Délivrance » : qui en sait tant sait pratiquement l'essentiel et peut déjà, comme firent les Cinq, se convertir de confiance et se laisser ordonner moine ; mais il est encore bien loin d'être entré dans le secret de la doctrine. Ainsi en cosmographie on commence par étudier le mouvement apparent des étoiles, et ce mouvement, pour irréel qu'il soit, permet aux navigateurs de reconnaître leur route et d'atteindre leur destination : toutefois leur crasse ignorance . ne cessera que du jour où ils sauront que ce n'est là qu'une erreur grossière de nos sens et qu'en fait c'est notre terre qui tourne et non les astres. De même dans les trois grands systèmes philosophiques de l'Inde la connaissance se développe tour à tour sur deux plans bien différents, celui de l'expérience commune, que ne dépasse pas le vulgaire, et celui de la vérité ésotérique, apanage des seuls initiés. La formule étroitement anthropocentrique des Quatre vérités ne présente guère que le côté pragmatique et moralisateur de la pensée du Bouddha : il nous reste encore à apprendre de sa bouche de quelle insidieuse illusion nous sommes tous, tant que nous sommes, les trop complaisantes victimes. Notre salut ne sera vraiment assuré que du jour où nous saurons qu'une irrémédiable impermanence frappe tous les phénomènes aussi bien psychiques que physiques (par bonne chance les douloureux comme les autres), et que le fond des choses consiste justement en ceci qu'elles n'ont aucun fond. Et voici enfin que surgissent ces conceptions que le Maître lui-même déclarait difficilement intelligibles et dont le caractère abstrus l'a fait hésiter à en entreprendre la prédication. Avouons qu'en effet elles ne laissent pas d'exiger un certain entraînement au maniement des idées abstraites. Chacun, en une heure de pessimisme, se laissera persuader sans trop de peine que le monde extérieur soit pareil à un kaléidoscope toujours en mouvement et qui (contrairement à son nom) ne nous montrerait que de laides images et ne nous infligerait que des impressions pénibles : mais quand on ajoute que de ce kaléidoscope ni l'étui, ni les miroirs, ni les éléments colorés, ni le spectateur même n'ont d'existence substantielle et durable, il faut faire quelque effort pour tâcher de le concevoir clairement. Telle est pourtant la thèse fondamentale de la Bonne-Loi, et celle qui de tout temps l'a fait accuser par ses contradicteurs de n'être qu'un pur « nihilisme » : à tort d'ailleurs, car, ainsi que l'a bien montré Th. Stcherbatsky, cette « vacuité », dont à travers toutes leurs subdivisions les sectes bouddhiques élaborèrent à l'envi la notion, ne doit pas être entendue comme « néant », mais comme « relativité ». On peut d'autant moins douter que le principe en remonte à l'enseignement de Çâkya-mouni que seule cette conception confère son unité en même temps que son originalité à tout son système. Qu'il ait, ou non, dressé les intermi-