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La Vie du Bouddha : vol.1 |
LA PREMIÈRE PRÉDICATION 205
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nables listes de dharma ou « normes » ---entendez ici par ce mot à tout dire, les éléments ou facteurs derniers du monde des appa-
4 rences, les grains (que ne réunit aucun fil !) du chapelet de nos
états de conscience -- peu importe : il a tout au moins fixé les
ill lois de leurs fugaces apparitions. Vraisemblablement aussi, dans
sa préoccupation de compatissant thérapeute, il s'est avant tout intéressé aux retentissements de sa doctrine sur la destinée humaine, et il a laissé aux théoriciens postérieurs le soin de l'adapter
ii j, à l'ensemble de l'univers. Un fait ne s'impose pas moins de toute
évidence aux historiens de la philosophie : les tenants de la révé-
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14 lation védique ne s'inquiètent que de retrouver l'Un sous le
Multiple et de dégager l'Etre en soi , du voile versicolore de la
lit Mâya ; les rationalistes se plaisent a faire danser l'ondoyante
lit Nature pour le divertissement et le dégoût final de l'immuable
kg Esprit ; les bouddhistes se refusent à découvrir nulle part der-
rière les phénomènes aucune substance, aucune entité, aucun
il', noumène. C'est ce qu'a bien noté Paul Oltramare : « Tandis que
le Védânta affirme l'être et nie le devenir, tandis que le Sânkhya
Pi Pi affirme à la fois l'être et le devenir, le bouddhisme nie l'être et ne
garde que le devenir ». A de tels dissentiments théoriques ne pou-
kt vaient que correspondre des conceptions non moins différentes
gat du salut. Le Védantiste ne rêve pour son âme que de « non-dua-
liii lité », de réabsorption dans le Grand Tout dont elle est une par-
10 celle momentanément égarée. L'idéal pour l'adepte du Sânkhya
I est au contraire « l'isolation » totale de l'Esprit, son complet a-
it pêtrement des liens où se plaît à l'enlacer la tentaculaire Nature.
i1 Le but que de son côté se propose le bouddhiste est la « cessation »,
ii l'abolition pure et simple, en ce qui le concerne, du train doulou-
0 reux du samsdra. En léguant à ses disciples, comme fruit de ses
études et de ses méditations, le double mot d'ordre de la « vacuité » et de la « suppression », le Bouddha (qu'il ait été ou non le premier à le proclamer sans aucune ambiguïté) s'est placé pour nous à la tête d'un des trois grands courants de la pensée indienne.
Nous ne pouvons ici qu'esquisser brièvement cette doctrine assez difficile à pénétrer, surtout pour des gens élevés comme nous dans des idées soi-disant spiritualistes, lesquelles ne sont en fait que l'héritage mal épuré des superstitions animistes de nos sauvages ancêtres. Une comparaison viendra, cette fois encore, à notre secours. Plaçons un Occidental devant une rivière : son premier soin va être de lui donner un nom et de relever son tracé depuis sa source jusqu'à son embouchure ; ce que faisant, il lui créera une apparente individualité entre toutes les rivières qui figurent sur les cartes. Cette première opération le retient sur le plan pratique de la recherche expérimentale. Si à présent on l'invite à philosopher, il discernera vite, comme jadis Héraclite, le caractère perpétuellement évanescent de l'écoulement des eaux ; mais on aura beaucoup plus de peine à lui faire . admettre que leurs rives ne constituent pas en revanche un cadre solide et per-
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