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0253 La Vie du Bouddha : vol.1
La Vie du Bouddha : vol.1 / Page 253 (Color Image)

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doi: 10.20676/00000286
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~J.

L'OFFICE DE BOUDDHA   251

prodiges pour que leurs chers révérends n'eussent jamais à sôuffrir de la faim.

La dévotion est une belle chose ; encore faut-il qu'elle ne s'égare pas : sinon elle peut mener jusqu-au crime. Le souvenir s'était conservé d'une invitation qui cachait de criminels desseins. N'oublions pas que de nombreuses sectes exploitaient concurremment la charité du bâzâr, et de tout temps une guerre sourde ou déclarée, dont l'enjeu était pour elles vital, se livrait entre leurs ressortissants autour du partage des aumônes : à plus forte raison la nouvelle congrégation devait-elle exciter la jalousie des anciennes auxquelles elle disputait forcément leur clientèle laïque. Seul, nous assure-t-on, le Bouddha, avec son sens inné des convenances, demandait à ses néophytes de bien réfléchir avant de lui transférer leur allégeance et leur conseillait de continuer leurs charités aux rivaux qu'il supplantait dans leur foi et dans leur coeur. Mais il n'en allait pas de même des hétérodoxes qui n'hésitaient pas à défendre âprement, et par les pires moyens, leurs situations acquises. Il n'est pas, comme nous verrons bientôt, de scélératesse que les bouddhistes ne leur prêtent, particulièrement à ceux qui poussaient le voeu de pauvreté jusqu'à vivre entièrement nus et qui semblent avoir été les plus haïssables à leurs yeux, peut-être parce qu'ils étaient les mieux ancrés dans la vénération populaire. S'il faut en croire nos sources, Pourana, le supérieur de l'une d'elles, n'aurait comploté avec un bourgeois de Râdjagriha, son âme damnée, rien moins que la mort du Bienheureux. Il persuada à son dévot de feindre d'inviter celui-ci à dîner, et de creuser devant sa porte une fosse profonde, pareille à celles qui servaient à prendre les bêtes féroces, et pour plus de sûreté, avant de la recouvrir de minces branchages et d'une natte, d'y amonceler des charbons ardents. Bien qu'il eût pénétré les perfides intentions de ce Çrîgoupta, le Bouddha accepte l'invitation et s'y rend avec tout son entourage ; mais à son approche la fosse ardente se change en un étang de lotus, dont les fleurs jettent comme un pont sous ses pas et ceux de sa suite.

Faut-il le dire ? De l'aveu de nos textes il y avait eu provocation. Quelques jours plus tôt, au moment ou Pourana entrait comme à l'accoutumée dans la maison de son zélateur pour y prendre son repas, il avait eu un sourire, et aussitôt un de ses disciples, de mèche avec lui, lui en demanda la raison. Il répondit : « C'est que ie viens de voir un singe tomber à l'eau et se noyer dans la rivière Lente » — celle qui arrose Çrâvastî, à des centaines de lieues de là. Stupeur admirative de tout l'auditoire. Seule l'épouse de Çrîgoupta, en sa qualité de dévote bouddhiste, n'est pas dupe. Elle prend la sébile de l'ascète et, contrairement à l'usage ordinaire, y verse d'abord la sauce de cari, puis la remplit de riz jusqu'au bord, et la lui rapporte. Quand Pourana, surpris de tant de blancheur, réclame des condiments, son imposture est aussitôt dévoilée, puisque son prétendu oeil divin n'est même

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