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0261 La Vie du Bouddha : vol.1
La Vie du Bouddha : vol.1 / Page 261 (Color Image)

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doi: 10.20676/00000286
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L'OFFICE DE BOUDDHA   259

nique, ainsi qu'il convient pour des gens qui, de même que les adeptes du Véda, ne se fiaient qu'à leur mémoire pour retenir les instructions orales de leur Maître. Rappelez-vous comment aux cinq premiers disciples, sitôt ordonnés, il répète à satiété, à propos des cinq éléments constituants de toute existence personnelle (forme corporelle, sensations, représentations, volitions, conscience), qu'aucun d'eux n'a de réalité substantielle ; ' ou encore comment, pour parachever la conversion des mille anachorètes du Magadha, il leur enseigne que les six sens (le sens interne compris), ce qu'ils perçoivent et les impressions qui en résultent sont la proie de l'impermanence. Et à propos de chacun de ces cinq facteurs ou de ces six organes, pris un à un, il ressasse de bout en bout, exactement dans les mêmes termes, le même développement. Il est clair qu'il se croit (ou qu'on l'a cru) obligé de marteler sans relâche ses idées dans le cerveau de ses disciples monastiques jusqu'à être bien sûr qu'à force de répétitions machinales ils ne pourront plus les oublier.

LE BOUDDHA ET LA CASTE. — Ainsi, ou à peu près ainsi, prêchait Çâkya-mouni : et de la lecture des textes il ressort du moins jusqu'à l'évidence que, comme nous l'assure la tradition, il savait admirablement adapter sa prédication aux besoins spirituels et au caractère de ses auditeurs. Tour à tour, selon les circonstances, « par le triple prestige soit de son pouvoir surnaturel, soit de ses préceptes de morale, soit de son exposé dogmatique », il étendait et consolidait chaque jour davantage, sur un nombre croissant de disciples, l'empire de la Bonne-Loi. Il ne peut être question d'entrer ici dans le détail des adhésions et conversions dont la tradition avait retenu et transmettait les noms et les circonstances : il nous suffit d'entrevoir comment le Bouddha comprenait et pratiquait son ministère de Sauveur : « Jamais, assure-t-on, il ne lui venait à l'esprit de se dire : Cet homme est noble, cet homme est brahmane, cet homme est riche, cet homme est pauvre : je prêcherai à celui-ci de préférence à celui-là ». Comme la pluie du ciel sa parole s'épandait sur tous sans distinctions, qu'ils fussent jeunes ou vieux, intelligents ou obtus, vertueux ou criminels, de haute ou de basse naissance ; et la caste, ce corselet de fer dont la société indienne n'est pas encore arrivée à se dégager, n'existait pas pour lui. C'est surtout ce dernier trait qui a frappé les Occidentaux, pour la raison que de toute antiquité la lutte des classes existe chez eux à l'état endémique : et certains ont voulu faire du Bouddha une sorte de tribun du peuple, se posant en réformateur social. Il serait bien surpris s'il revenait sur la terre d'apprendre que l'on ait pu travestir à ce point sa personnalité et son rôle. Réfléchissez-y un instant. On n'entreprend pas de réformer un monde qui pour vous n'est qu'un mauvais rêve : on ne songe qu'à en sortir. On ne fomente pas de révolution pour renverser des barrières que l'on sait être aussi instables qu'illusoires : on se borne, en ce qui vous concerne, à les ignorer.