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0336 La Vie du Bouddha : vol.1
La Vie du Bouddha : vol.1 / Page 336 (Color Image)

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doi: 10.20676/00000286
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334   CONCLUSIONS

sur l'illusion du moi entraîne des conséquences des plus inquiétantes, voire même dirimantes pour la loi morale — à telles enseignes que plus d'un chef de secte contemporain du Bouddha avait pris texte de la périssabilité des âmes pour les affranchir de toute responsabilité. Et en effet, au milieu de la perpétuelle intégration et désintégration des assemblages phénoménaux et des non moins incessantes apparitions et disparitions des phénomènes eux-mêmes, on voit bien surgir d'innombrables occasions de douleur, mais on n'aperçoit pas de place pour les notions de bien et de mal. Si l'homme n'est qu'un nom et une ombre, à plus forte raison en est-il de 'même de la vertu. Pourtant nul n'ignore que le Prédestiné n'a pas professé avec moins de vigueur la rétribution des actes que la « vacuité » des acteurs. La permanence de la loi du karma est pour lui un dogme aussi essentiel que la fugace insubstantialité des êtres et des choses : ce sont là pour lui deux évidences devant lesquelles il n'est pas seulement funeste, mais stupide de fermer les yeux. Innombrables sont les passages des Écritures qui condamnent aussi irrémissiblement la négation de la sanction morale que l'affirmation de la réalité de l'individu auquel doit s'appliquer cette sanction. Comme bien on pense, ce n'est pas d'aujourd'hui que les incroyants ont crié à l'illogisme et que les théologiens bouddhiques ont essayé de réduire cette contradiction. Mais qu'ils n'espèrent pas se tirer d'affaire, comme l'apologète du Milinda panha, déjà aux prises ii y a deux mille ans avec les objecteurs indo-grecs, par de simples métaphores : comparaison n'est pas raison. Rien ne sert non plus

  • d'avancer que, si le poudgala sur qui retombe le poids des oeuvres n'est pas celui qui en est l'auteur, ce n'est pas non plus tout à fait un autre, et qu'héritant du crédit et du débit de celui qui vient de disparaître, il ne peut se refuser à endosser le. solde. Il ne suffit même pas de dire, comme nous l'avons déjà vu (p. 206), que la seule chose à considérer est le complexe karmique qui, tel un germe épidémique, évolue en passant de porteur en porteur, s'acheminant soit vers la virulence, soit vers l'innocuité, et que la personnalité de ces porteurs aussi irréels qu'éphémères et dont la vie n'est qu'une mort de tous les instants, n'a pas à entrer en ligne de compte : c'est là diluer la difficulté, ce n'est pas la résoudre. La vraie question est de savoir quand, pourquoi et comment la notion de qualité bonne ou mauvaise vient s'introduire dans le déroulement mécanique des groupes phénoménauk au point d'en modifier la valeur et d'en altérer le cours — précisons mieux : au point de substituer au vague lien causal qui les organise en séries le déterminisme de plus en plus strict de la loi qui les classe d'après leur mérite ou leur démérite.

Comme le Bouddha ne s'est jamais expliqué sur ce point, les exégètes modernes ont dû inventer une explication ; et la première qui se présente à l'esprit est que Çâkya-mouni, quand en son âge mûr il a élaboré son système philosophique, n'a pas pour