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0339 La Vie du Bouddha : vol.1
La Vie du Bouddha : vol.1 / Page 339 (Color Image)

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doi: 10.20676/00000286
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CONCLUSIONS   33 7

presque à chaque ligne. Souvenons-nous seulement de la description qui nous a été donnée de l'arrivée du Bienheureux à la Clairvoyance. homme, jeté sans l'avoir voulu dans un univers dont le mystérieux fonctionnement le condamne à d'intolérables souffrances, le Prédestiné s'est résolument placé au centre même du problème qui confronte chacun de nous. Quel parti prendre ? Se résigner lâchement, en bon fataliste oriental, à être le jouet passif et distrait d'un inexorable destin ? Sa forte intelligence et la compassion qu'il porte à ses semblables le lui interdisent. S'irriter puérilement contre un ciel qui demeure « muet, aveugle et sourd au cri des créatures » ? A quoi bon, puisqu'il n'attend d'en haut aucune apparition ni révélation surnaturelles ? Se briser la tête contre les murs de sa prison ? Ce n'est pas davantage une solution pour qui se sent pris dans le cycle fatal des renaissances. Sa seule ressource, soit dit encore une fois, est d'imaginer un plan d'évasion hors d'un monde jugé décidément inacceptable. C'est à ce moment qu'intervient pour lui la nécessité de prendre une vue d'ensemble de son lieu de détention et d'éprouver la solidité de son cachot comme de ses chaînes. Et dès lors nous comprenons mieux pourquoi il tient tant à en affirmer le caractère insubstantiel et instable : là gît sa chance de libération. Quel espoir pourrait-il entretenir de dégager son moi personnel du perpétuel renouvellement de l'Être, si tous deux existaient en soi et de façon permanente ? Il se trouverait dans l'impossibilité de les dissoudre l'un et l'autre dans le vide apaisant du Nirvâna. Sans doute il lui resterait l'alternative, en faveur chez les brahmanes, de résorber finalement l'âtman individuel dans l'universalité du brahman : mais, bien que le Védantiste et lui boivent l'eau du même fleuve, dans la sphère de l'esprit leur attitude intellectuelle les situe aux antipodes, entièrement tendue chez le premier vers l'unité de l'Absolu,. toute penchée chez le second sur la pluralité et la relativité des Contingences. Là n'est pas d'ailleurs pour l'instant la question. Ce qui nous importe ici, c'est de constater que, de l'aveu même de la tradition, pour peu qu'on lui prête une oreille attentive, le Bouddha ne s'est fait philosophe qu'a posteriori et par nécessité. Il y a été contraint par la mission même qu'il avait cru devoir assumer et s'est vu dicter par elle le plus clair de ses théories. Le meilleur, sinon l'unique moyen de décourager la tenace obstination du désir, cause de tout le mal, n'est-il pàs de démontrer la totale inanité de son objet ?

Et quel procédé plus radical trouver pour couper l'égoïsme dans sa racine que de nier l'existence même de l'ego ? Ainsi, non moins

que le milieu qui acheva sa formation, toute l'orientation de son effort mental vouait d'avance le Prédestiné au phénoménisme. Loin que sa métaphysique soit en contradiction avec sa morale, il se découvre finalement qu'elle en est le postulat nécessaire, peut-être inventé après coup.

Ce qui encourage à penser que cette interprétation de la doc-

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