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0012 Trois Ans dans la Haute Asie : vol.1
高地アジアでの3年 : vol.1
Trois Ans dans la Haute Asie : vol.1 / 12 ページ(カラー画像)

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doi: 10.20676/00000241
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6   TROIS ANS DANS LA HAUTE ASIE

Je n'oublie pas non plus la Société de Géographie et son président, le prince Roland Bonaparte. Le prince Roland Bonaparte, géographe et naturaliste, est venu à ce double titre en aide à notre expédition. Quant à la Société de Géographie, absorbée par des travaux qui s'étendent à la terre entière, elle ne dispose pas toujours de ressources adéquates à ses besoins ou à ses désirs. Du moins a-t-elle tenu à placer notre mission sous le patronage d'un grand nom d'Asie en mettant à notre disposition les arrérages de la fondation Henri d'Orléans. Une coïncidence, un souvenir particulièrement tristes se rattachent pour moi à ce nom : en 1901, je sortais de l'hôpital de Saigon, où je n'étais pas bien malade, le jour même où Henri d'Orléans y entrait pour y mourir. Il m'a semblé voir dans cette circonstance, que la Société de Géographie ignorait naturellement, comme un symbole et un encouragement pour de nouveaux venus à poursuivre une tâche que la mort peut parfois ralentir, mais qu'elle ne saurait interrompre.

Me réservant l'archéologie, l'histoire, la linguistique, j'avais choisi pour compagnons le Dr Louis Vaillant, mé

voulu mettre à notre disposition, et qui nous ont accompagnés à travers toute l'Asie jusqu'à Pékin. En août 1906, avec une caravane de 74 chevaux, nous passions le Taldyqdavan, à près de 4.000 mètres, suivions les magnifiques pâturages des Kirghiz de l'Alaï, et, passant la frontière russo-chinoise à Irkechtam, au Nord des Pamirs, atteignions, après vingt jours, Kachgar. Nous étions enfin à pied d'oeuvre, au Turkestan chinois.

Le Turkestan chinois, si nous le limitons à sa partie essentielle, la Kachgarie, est un bassin fermé, enclos au Sud, à l'Ouest et au Nord par quelques-unes des plus hautes chaînes du globe, à l'Est et au Nord E-t par des seuils qui le séparent de la Chine proprement dite et de la Mongolie méridionale. Une dépression centrale, le Lob-Nor, recueille par le Tarim toutes les eaux qui ont pu traverser les sables sans s'y perdre. Toutes les montagnes sur le versant kachgarien sont parfaitement nues et stériles, si bien que, sauf en passant sur le versant nord des T'ien-chan, nous avons pu voyager près de deux ans sans

voir sur la montagne,je ne dirai pas un arbre, mais un brin d'herbe. D'où un régime d'eaux

ROCHERS DÉCHIQUETÉS PAR LE VENT

torrentiel, irrégulier. De plus, le climat est très sec. Il pleut à peine, il neige plus rarement encore. Et quand il a neigé et que le soleil ou la chaleur du sol font fondre cette neige, l'état hygrométrique est tel en ce pays que cette neige en fondant s'évapore et s'en va dans l'atmosphère sans mouiller le sol. Un jour d'hiver, non loin de Koutchar, je suis allé à l'entrée de la montagne fouiller au pied d'une ancienne tour; j'y comptais trouver des tablettes inscrites dont on m'avait déjà apporté un ou deux spécimen Et là, sous la neige et la terre, à 20 centimètres à peine de profondeur, j'ai en effet mis à jour des tablettes encore intactes, que dix siècles d'intempéries n'avaient pas réussi à atteindre. Enfin, le dénivellement étant très faible, les rivières de ce pays si sec se tarissent vite par absorption et évaporation. De là, nécessité pour la culture de se fixer où l'eau est encore abondante, à la sortie des montagnes. Et c'est ce qui vous explique la double ligne

ENTRE IRKECIITAM ET KACHGAR   d'oasis, au Nord et au Sud de ce 'l'agis makan

(Les photogravures publiées dans ce compte rendu reproduisent les photographies   auquel les récits de Sven Hedin ont fait à

do M. Nouette, photographe de la mission Pelliot. (Copyright mission Poiliot.)

juste titre une si fâcheuse réputation. Le sol

decin de l'armée coloniale, qui se chargeait des travaux de cartographie, d'astronomie et d'histoire naturelle, et M. Charles Nouette, à qui était confiée la documentation photographique. Nos patrons scientifiques et moi-même augurions beaucoup de leur talent et de leur zèle. Vous verrez au cours de cette conférence que ces espérances n'ont pas été déçues; elles ont été dépassées.

Nos préparatifs achevés,— ils avaient duré près d'un an, — nous quittions Paris le 45 juin 1906, et dix jours plus tard, par Moscou et Orenbourg, arrivions à Tachkend, la capitale du Turkestan russe. Je ne vous parlerai pas de ce pays qui est déjà fort connu; je ne vous en montrerai même pas de photographies, car on n'en saurait faire de plus belles que celles que Paul Nadar en a rapportées il y a déjà près de vingt ans. Je vous dirai seulement que nous sommes restés à Tachkend près d'un mois : il me fallait au moins ce délai pour prendre quelque pratique du turc oriental, que je n'avais étudié jusque-là, et assez sommairement, que dans les livres. Entre temps, nos bagages arrivaient, et alors nous poussions à une étape au delà du terminus du chemin de fer, à Och, pour y organiser notre caravane vers la Kachgarie. Nous retrouvions là les Cosaques que Sa Majesté l'Empereur de Russie avait bien

dans ces oasis est excellent. Les fruits abondent, et je ne connais que les melons de Samarkand qui puissent rivaliser avec ceux de Kachgarie. Mais cette fertilité même ne peut rien sans l'irrigation artificielle. Puisqu'il ne pleut pas, il faut des canaux. Aussi, dès que des bouleversements politiques dispersent la population. l'eau n'arrive plus, les jardins meurent, et en quelques années des établissements actifs ont fait place au désert, à la désolation, à la mort.

La population est concentrée dans des oasis, que séparent d'immenses étendues désertes. Dans ce pays grand comme deux fois et demi la France, il ne vit guère plus de 2.000.000 d'habitants. Le Turkestan chinois appartient politiquement à la Chine, mais l'administration seule est chinoise : la population est une population musulmane, de langue turque. Toutefois l'islam est une religion assez récente. Mahomet ne vivait qu'au vile siècle; ses adeptes n'ont conquis la Kachgarie, et en partie seulement, que vers l'an 1000 de notre ère. Or, on savait que les populations du Turkestan, avant cette conversion à l'islam, étaient bouddhistes. On vous l'a dit, Messieurs, c'est la recherche des vestiges de ce bouddhisme préislamique en Kachgarie qui était le but premier de notre expédition.