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『東洋文庫所蔵』貴重書デジタルアーカイブ

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0192 La Vie du Bouddha : vol.1
仏陀の生涯 : vol.1
La Vie du Bouddha : vol.1 / 192 ページ(白黒高解像度画像)

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doi: 10.20676/00000286
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190   LE CYCLE DU MAGADHA ET DE B1NARÈS

Depuis des siècles le monde bouddhique connaît par expérience la solution qui est intervenue pour ce dilemme ; et, il n'y a qu'un instant, le Bouddha n'a pas caché au Tentateur laquelle des deux décisions possibles il a déjà adoptée. Pourtant les dieux, et nous, et le Maître lui-même sommes encore censés plongés dans une totale incertitude, et il faut qu'un récit circonstancié vienne nous rassurer sur ce point capital : tant les hommes, comme les enfants, aiment à réentendre les contes dont ils connaissent d'avance le dénoûment. Nous ne serons pas autrement surpris de nous trouver, cette fois encore, en présence de deux versions différentes, l'une toute rationnelle et l'autre éperdument mythique où se reflète la tournure d'esprit particulière des deux grandes moitiés constituantes de l'église bouddhique — d'une part la Communauté monastique prise dans son cadre relativement rigide, et d'autre part la masse flottante des fidèles laïques. Selon les bhikshou le Prédestiné commence, fort légitimement, par hésiter à prêcher une doctrine qui risque de n'être ni comprise ni acceptée par le vulgaire ; ce n'est qu'à la deuxième réflexion que la compassion pour l'humanité souffrante l'emporte sur l'égoïsme de la raison. Au gré des zélateurs, c'est aux supplications des dieux, mobilisés en masse, que nous devrions le consentement du Maître. Mais les deux exposés ne nous sont pas servis à part, comme dans le cas de l'Abkisambodhana (supra, p. 143-4) : les plus anciens textes insèrent déjà l'intervention divine entre les deux états d'âme successifs du Prédestiné, d'abord indécis, puis résolu ; et si cette grande parade mythologique ne s'en démontre que plus superflue, elle fournit du moins aux illustrateurs le moyen de figurer cette nouvelle crise psychologique.

Il n'arrive rien dans la vie d'un Bouddha qui ne se soit déjà produit et ne doive se reproduire dans celles de ses prédécesseurs et de ses successeurs : il faut donc admettre que tout Illuminé frais éclos doit hésiter à communiquer .aux profanes la vérité qu'il vient de découvrir. A cela deux raisons, toutes deux judicieuses, l'une d'ordre intellectuel et l'autre d'ordre moral. La doctrine, nous dit-on, est profonde et demande pour être comprise une certaine contention d'esprit ; et d'autre part, prêchant l'extinction du désir, elle exige pour être embrassée une notable maîtrise de soi-même et de ses passions : comment l'homme moyen, en proie à ses convoitises toujours renaissantes et jouet de ses perpétuelles distractions, serait-il capable de la saisir dans ses principes et de la pratiquer dans ses prescriptions ? Celles-ci rebuteront la faiblesse de son coeur, ceux-là dépasseront le niveau de son intelligence, et le prêcheur perdra sa peine et son temps : « Mieux vaut ne pas se faire de souci et se taire. » Et c'est ainsi que le premier mouvement du plus éminent des sages est de se laisser aller à suivre la idi du moindre effort. — Mais quoi, l'humanité engagée dans le tourbillon des renaissances se verra donc refuser toute chance de jamais échapper à ce cercle infernal ?