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0020 Inscriptions de l'Orkhon : vol.1
Inscriptions de l'Orkhon : vol.1 / Page 20 (Color Image)

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doi: 10.20676/00000225
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- VI -

le jour suivant, après l'arrêt forcé dont il est parlé plus haut, nous fûmes les premiers qui tentèrent le passage; mais il nous fallut travailler 6 heures avant de pouvoir gagner la rive opposée, notre unique moyen de transport étant un bac, construit avec trois arbres creusés, que des Mongols à peu près nus poussaient en avant dans la rivière, et que des chevaux tenus par la queue traînaient ensuite à la nage. Le passage de la première branche de la rivière nous coûta 8 briques de thé à 30 kopecks, et pour traverser la seconde branche, qui formait la Tola proprement dite, nous eûmes à payer 3 roubles d'argent.

Sur les 'hauteurs qui bordent la route on remarque d'abord de petits tas de pierres, nommés »abos», qui ont été posés de nos jours par les Mongols, et garnis de tablettes de pierres, sur laquelle est gravée la formule d'invocation usitée: »Om ma ni pad me hum» ou quelque autre devise thibétaine *. Nous trouvâmes en outre à plusieurs endroits, entre la Harouha, affluent de la Tola, et l'Ouguéi-noor, (les monceaux peu éléves, dont l'origine remonte à des temps plus anciens. Ceux-là sont composés de pierres rugueuses, rangées de manière à former diverses sortes de figures, soit rondes ou autres. Ces monceaux sont connus sous le nom de »kereksours», et l'on en rencontre, à ce qu'on dit, dans presque toutes les parties de la Mongolie jusqu'aux versants méridionaux des monts Tian-chan **. Près de la Harouha notre attention fut attirée par les ruines d'un ouvrage de fortification, entouré de remparts, de fossés et ce qu'on appelle des »soubourganes» c. à. d. de petites tours oa l'on place des simulacres bouddhiques. Au milieu de ces ruines s'élevait autrefois une construction de forme carrée, ayant des murs d'une grande hauteur encore à présent, et dont la surface unie offrait un joli coup d'oeil; ils paraissent avoir été maçonnés avec des feuilles d'ardoise. Après avoir franchi deux portes on entre dans l'intérieur du carré, dont le côté septentrional était divisé en plusieurs chambres. Les murs avaient 11/2 mètre d'épaisseur; leur face intérieure était revêtue de mortier, et l'on peut encore y distinguer des parcelles du faîtage mitoyen.

Quelques heures avant notre arrivée au lac Ouguél-noor j'allai examiner un monument en pierre, qui se dressait isolé dans la steppe près de la route, et paraissait n'être proprement qu'un bloc de pierre posé debout, de la hauteur d'un homme. Mais à l'entour de la pierre, vers le haut, je remarquai une

* Les Mongols, quand ils passent devant ces „abos", aiment à fixer sur des baguettes, plantées dans ces tas, des lambeaux d'étoffe ou quelques crins de leur cheval en guise de sacrifice. Un de nos gens mongols y attacha une fois aussi, comme une offrande de noire part, des crins de nos chevaux sur l'un de ces autels de pierre.

** M:r Potanine donne par rapport à la forme et à la présence de ces kéreksours des renseignements précieux dans son ouvrage: Ovepsn cksepo-aanaAnoll Monrosie. St. Pétersbourg 1881. II, 47— 65. Le lama qui yous accompagnait appelait ces mêmes figures des „hirgiss". Comp. M. A. Castrén, Resor och forskningar (voyages et explorations) II, 418, où il nous apprend que les konrganes de la Transbaikalie sont appelés „Kirgisi-ur.

bande taillée obliquement dans le pierre et formée d'une rangée de 39 petits creux. Cette bande était placée de telle sorte que la partie tournée vers le Nord était le plus en-bas et celle qui regardait le Sud, le plus en haut: cette dernière pouvait donc être censée former le visage, bien qu'on n'y pût distinguer aucun contour de cette nature qui y ressemblât. Les autres détails donnaient également lieu de penser qu'on avait voulu par cette figure représenter un héros. Car autour de la pierre, en-bas, on distinguait, taillée dans celle-ci, une ceinture ornée, large de deux pouces. Sur la face tournée vers l'Orient, au côté gauche de la figure, on voyait gravés, un arc et une flèche, et sur la face opposée, à droite de la figure, était gravé un poignard. Tout autour sur le sol, des pierres étaient disposées de telle sorte qu'elles formaient un carré, et le buste de pierre était placé dans la partie de cette enceinte qui regardait le Sud. A trente pas de distance environ du côté du Nord on apercevait une butte de terre aplatie, mesurant 10 pas en diamètre, et qui peut-être a été élevée avec intention, quoiqu' on n'y vit point de pierres, ni disposées en figures, ni autrement.

La figure de pierre dont nous venons (le parler est donc de la même espèce que celles, qui se trouvent en grand nombre dans l'Ouranhaï, c. à. d. dans les contrées que parcourt le Ienisséï dans son *ours supérieur au Sud des monts Sajans. L'ouvrage de Potanine contient également des descriptions et des dessins représentant une quantité de figures semblables en pierre et qui sont appelées »babas.

Un des moments les plus agréables de notre voyage fut celui de notre arrivée sur les bords de l'Ouguéï-noor. Il avait

plu la nuit précédente, et la journée commençait par une ma-   ..
tinée sombre avec un ciel couvert de nuages. Depuis une semaine nous voyagions à dos de cheval, ce qui avait fini par devenir . pénible, et c'était trop peu de temps pour nous yaccoutumer. Le 15 Mut vers l'heure de midi nous dressions nos tentes sur la rive méridionale du lac, dont la plage était couverte de galets et de sable. Le ciel paraissait s'éclaircir, et le clapotement des vagues qui déferlaient sur la grève, nous impressionnait délicieusement; à quelque distance de nous, des cygnes se promenaient majestueusement sur l'onde limpide d'une crique. Nous avions aperçu plusieurs kereksours sur le promontoire montueux, que nous venions de traverser. Le lac d'Ouguéï-noor a, dit-on, environ 40 verstes de circuit, et passe pour être très poissonneux; l'eau en est transparente comme le cristal. De l'autre côté du lac se dressaient des montagnes bleuâtres, et sur ce fond se détachaient, vers la droite, les bltiches constructions du monastère d'Orombo; vers la gauche, de sombres collines, que l'on nous dit être les ruines d'un ancien palais ou bien un fort bâti sur les bords de la Hola, cours d'eau qui relie l'Ouguéï-noor à l'Orkhon, dont la vallée était cachée à nos yeux par d'autres élévations de terrain. Nous nous recot4ttâmes en nous baignant dans l'eau fraîche et limpide du lac, et en nous régalant des canards que nous avions tirés le matin même et fait rôtir.

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