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0047 Inscriptions de l'Orkhon : vol.1
Inscriptions de l'Orkhon : vol.1 / Page 47 (Color Image)

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doi: 10.20676/00000225
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— XXIX

gisent les débris en question; plusieurs d'entre eux, dans de telles conditions d'emplacement, pourraient provenir de la stèle épigraphique que, selon l'Histoire chinoise à la date de 784, un Khakan des Ouïgours avait fait élever devant la porte de sa capitale pour rappeler aux Envoyés de la Chine tous les services rendus à ce pays par lui et ses prédéces-

seurs q 1t. q 3f lt,   t>A N ► !i` t tc fit 4:* # m et w iC

Le Khakan des Ouïgours était à cette époque un certain Toun Mo-ho' Tarkan qui, après son avènement en 780, est désigné par les auteurs chinois sous le titre turk, peut-être incomplet, de Koutlouk Pék Kkakan. Pour monter sur le trône, il lui avait fallu mettre à mort son prédécesseur et neveu, Meou-yu Khakan dont il était le grand vizir; la raison ou plutôt le prétexte de ce régicide fut que Meou-yu Khakan (désigné sous le titre de Kiè-tou Teng-li Kou-tcho Mo-mi-ch ho Kiu-lou Pëk Khakan) ruinait l'État par son luxe et allait, sur l'avis de mauvais conseillers, risquer contre la Chine une immense expédition dont le but était l'anéantissement de la dynastie des Tang.

Telle est du moins l'explication que Toun Mo-ho Tarkan croyait la plus avantageuse à fournir à la cour de Chine dont il était le vassal ; mais par la suite, constatant que le souverain chinois ne se montrait pas aussi reconnaissant qu'il l'avait souhaité, Toun Mo-ho Tarkan, crut nécessaire de rappeler les hauts faits des Khakans Ouïgours, au concours armé desquels la dynastie des T'ang devait de ne pas avoir sombré sous les coups de plusieurs rébellions. Toun Mo-ho Tarkan, quatrième Khakan des Ouïgours de l'Orkhoun, régna de 780 à 789. Telle est l'origine de la stèle signalée par les annales chinoises en 784 à l'une des portes de la capitale des Ouïgours et dont plusieurs fragments se trouvent peut-être parmi ceux que nous publions. Voici quelques considérations qui me semblent devoir militer en faveur de cette hypothèse :

4° Le déchiffrement des deux fragments rapportés par N. Yadrintzev et de ceux fournis par M. Heikel nous démontre amplement que leur texte chinois est la glorification des hauts faits de quatre Kkakans et non pas d'un seul prince;

en effet, le fragment n° 2 rapporté par N. Yadrintzev, mentionne Gueuk Pëk Khakan, titre porté par Koli-pei-lo, fonda-

teur du khanat des Ouïgours de l'Orkhoun (742-745), et trois fois ailleurs nous trouvons mention de la transmission du pouvoir souverain.

2° Les fragments que représentent les planches 58-59 nous fournissent en chinois, immédiatement ci gauche du

texte ouïgour, un intitulé de stèle : « Ai Teng-li lo koumo-mi-ch Pi-kié K'o-han cheng teh cheng kong pei ping sire. » Vu les considérations qui précèdent je propose de

!. Le terme Mo-ho qu'on lit dans les titres de certains princes turks des vile et vni° siècles serait dérivé du sanscrit Mahd. (grand) selon Stanislas Julien. Tarkan est un titre de noblesse.

traduire littéralement cet intitulé par « Stèle des saintes vertus et des divins exploits de (ou des) Ai Teng-li lo kou mo- mi-ch ho Pëk Khakans, avec prolégomènes » Cet intitulé traduit au pluriel corroborerait ce qu'indique le corps de l'inscription, c'est-à-dire qu'elle est en effet destinée à commémorer les hauts faits non pas d'un mais de plusieurs Khakans. Nous considérons de la sorte les mots turks transcrits par At Teng-li ln kou mo-mich ho comme constituant un fond d'épithète générale pouvant se retrouver dans les titres de tous les Pék Khakans ouïgours Le tableau chronologique des Khakans ouïgours publié par M. le professeur Radlov me parait justifier cette interprétation. Conf. les Zapisky de la Soc. russe d'archéologie, t. V, 1894, pp. 447456, 265-270'.

3° Quoique rédigée en chinois, l'inscription parait être d'origine ouïgoure ; en effet le Khakan auteur de l'inscription y parle plusieurs fois à la première personne en traduisant Moi par Yu fi , terme dont ne se serait pas servi un souverain chinois.

4° L'écriture chinoise de ce monument est trop négligée pour être l'ceuvre des stélégraphes officiels de la cour de Chine.

5° L'empereur de la Chine, suzerain des Ouïgours, est désigné sous le titre de Tien Khakan (Khakan Céleste) titre au-dessus duquel deux espaces blancs sont laissés par respect, tandis qu'il n'en est laissé qu'un au-dessus des épithètes désignant les princes ouïgours. Cette épithète de Khakan du Ciel ne se trouve employée, dans l'histoire de la Chine, que par les princes de race turke : aussi me parait-elle dériver d'un terme plutôt turk que chinois.

6° Au bas de la ligne 9 de la planche 53-54, on lit : « Moi, Koutlouk Pëk (Khakan). » Toun Mo-ho Tarkan est un des trois Khakans ouïgours que l'histoire chinoise nous montre avec précision paré du titre de « Sa Hautesse le Sérénissime Khakan. » Koutlouk signifie heureux.

7° La planche 53-54 parle d'une guerre avec les Tibétains. C'est du v° au x° siècle qu'eurent lieu les invasions tibétaines en Chine et dans la haute Asie. Les principales batailles qui leur furent livrés par les Chinois avec le concours des Ouïgours, eurent lieu en 765; 773, 784, 789, 794 ; l'une d'elles, on le voit, est de la même année que nous assignons comme date à la stèle érigée par Toun Mo-ho Tarkan.

i. Si l'on traduisait au sigulier cet intitule, la stèle où il est écrit serait ainsi dédiée à un seul prince du titre de Aï Teng-li lo kou tno-rrtich ho Pd Khakan, titre alors probablement attribuable à To-lo-sse qui, de 789 ù 795, porta ce titre avec l'épithète de koütchlouk (fort) après la mort de son père, Toun Mo-ho Tarkan ; mais du même coup la stèle devrait étre considérée comme monument. funéraire, ce que rend peu vraisemblable son emplacement à proximité d'une ville ou d'un palais dont la construction serait antérieure à l'érection de cette stèle. Ce qui m'empêche d'affirmer que ces fragments appartiennent h une seule et même inscription c'est que sur certains d'entre eux le texte ouïgour est h droite du chinois et sur un autre il est à gauche avec un sceau (malheureusement illisible) enclavé dans le texte chinois indéchiffrable.