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0153 Mémoires Concernant l'Asie Orientale : vol.1
Mémoires Concernant l'Asie Orientale : vol.1 / Page 153 (Color Image)

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doi: 10.20676/00000249
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116   MÉMOIRES CONCERNANT L'ASIE ORIENTALE

intervention de l'impératrice paraît exclue. Cependant les vingt-quatre poésies sont bien celles mêmes du Along sang t'ou, et ainsi Tchao Mongfou a créé lui-même, par des affirmations contradictoires, la confusion que nous tentons de dissiper.

  •   Dès lors, nous devons nous demander si, de la part de Tchao Mongfou, cette confusion n'a pas été volontaire. Autrement dit, quand, en 1318, Tchao Mong-fou narrait de façon si minutieuse l'histoire du Nong sang t'ou, quelque raison existait-elle de ne pas reporter sur une impératrice l'honneur de son initiative éventuelle? Connaît-on une impératrice dont, pour les auteurs du Nong sang t'ou, il valût alors mieux ne pas se réclamer? Ainsi posé, et si nous nous en tenons aux impératrices qui se trouvaient à la Cour en 1318, le problème risque de demeurer insoluble. Mais, pour quiconque s'est un peu occupé d'histoire mongole, le souvenir s'éveille immédiatement d'une autre impératrice qui fut toute-puissante au début du quatorzième siècle et succomba finalement dans sa lutte contre Jen-tsong et son frère. Cette impératrice, appelée Bulughan, était la femme de l'empereur Tch'eng-

tsong, plus connu sous son nom mongol de Tämür   Tch'eng-tsong
avait succédé à Khubilaï dans le courant de 1294 ; dès 1295, il élevait sa femme Bulughan au rang d'impératrice. Lui-même était de santé précaire, et l'influence de l'impératrice grandit au point que, dans les dernières années du règne de Tch'eng-tsong, c'est elle qui était vraiment à la tête du gouvernement. Tch'eng-tsong mourut en 1307. A ce moment, l'impératrice Bulughan tenta d'écarter du trône, au profit du prince Ananda, les deux frères neveux de Tch'eng-tsong, c'est-à-dire Kliaisan Külüg et Buyantukhan. Mais elle fut vaincue, exilée et bientôt tuée. Khaisan Külüg, connu dans l'histoire sous son nom posthume de Wou-tsong, régna de 1307 à 1311; son frère Buyantu-khan lui succéda : ce fut le Jen-tsong qui régnait encore en 1318. Comme de juste, le nom de l'impératrice Bulughan évoquait à la Cour de Jen-tsong des souvenirs fâcheux. Supposons que Yang Chou-k'ien et Tchao Mong-fou aient commencé vers 1307, sur des instructions de l'impératrice Bulughan, un travail que les événements ne leur permirent pas de porter au palais. Quand ils décident de le soumettre à l'empereur en 1318, il est tout naturel qu'ils en modifient le titre et ne se soucient pas de rappeler le rôle joué dans l'affaire par une impératrice exécrée. Mais, en dehors du Nong sang t'ou présenté au trône, les brouillons de 1307, avec l'ancien titre de Keng tche t'ou, subsistaient dans les papiers de Tchao Mong-fou, et ce sont ces brouillons qui furent édités par Chen Houang en 1339.