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『東洋文庫所蔵』貴重書デジタルアーカイブ

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0057 La Vieille Route de l'Inde de Bactres à Taxila : vol.2
インドからバクトリアのタキシラに到る古道 : vol.2
La Vieille Route de l'Inde de Bactres à Taxila : vol.2 / 57 ページ(カラー画像)

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doi: 10.20676/00000237
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LES INVASIONS DES BARBARES

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l'arrivée que M. P. Pelliot a proposé, avec infiniment de vraisemblance, de couper le lien d'identité artificiellement créé par la nomenclature chinoise entre les Ta-Yue-tche et leurs dynastes Kushâns. Les premiers seraient ce qu'ils pourraient ; les seconds deviendraient des Scythes, plus précisément des Tokhâriens, en tout cas des Iraniens orientaux. Quant aux savants européens, ils n'auraient à sacrifier aucune des données péniblement rassemblées par eux, si contradictoires qu'elles puissent paraître entre elles : il leur suffirait de les répartir entre deux individualités ethniques distinctes au lieu de s'entêter à les concilier sur une tête unique, fût-ce de Turc... A cette séduisante théorie paraissent s'opposer les faits nouveaux apportés par les documents de Touen-houang; mais, cette fois encore, la contradiction n'est qu'apparente. En quittant sous la pression des Hiong-nou leurs pâturages du Sud du Gobi, les « Grands Yue-tche » laissèrent derrière eux une partie des leurs qui trouvèrent un refuge dans les Montagnes du Sud, c'est-à-dire dans les Nan-chan, et que, pour les distinguer des autres, les Chinois surnommèrent « Petits Yue-tche ». Or, justement dans cette région, à l'ouest de Kan-tchéou, sur la vieille route de la soie, les informateurs du géographe Ptolémée et des documents tibétains sont unanimes à placer, pendant tout le premier millénaire de notre ère, leurs Thagouroi ou Thod-Kar. Il s'ensuit que, « petits » ou « grands », les Yue-tche étaient déjà des Tokhâriens à leur, point de départ. Dès lors il nous faut admettre, ou bien qu'ils appartenaient originairement à des tribus parlant des langues indo-européennes et aventurées jusqu'en Sérique dans leur croyance à l'invincibilité de leurs « deux cent mille archers »; ou bien, que s'ils étaient originairement des Mongols, en traversant de part en part toute la Scythie dans leur longue marche vers le soleil couchant, ils s'étaient très fortement iranisés en route. La première hypothèse est de beaucoup la plus vraisemblable ; mais, à la rigueur, la seconde fournirait aussi une solution au problème; et, enfin, ni l'une ni l'autre ne préjuge en rien de la véritable nationalité des dynastes Kushâns.

Par le fait, tout le monde admet que les Ta-Yue-tche ou Tokhâriens nomades, pourchassés par les Hiong-nou (on place leur mise en branle soit en 175, soit en 165 avant notre ère) chassèrent à leur tour devant eux les tribus scythes qu'ils trouvèrent installées sur leur passage, tant dans le Nord du bassin du Tarim (8) que dans la vallée de l'Ili : mais peut-être s'est-on fait de ces migrations en série une idée par trop simpliste. Invinciblement, elles évoquent à l'esprit l'image des longues théories de chenilles processionnaires. Accrochées à la queue l'une de l'autre, celles-ci s'arrêtent toutes, quand celle de tête rencontre un obstacle, mais ce n'est jamais pour longtemps; même si les premières sont écrasées, les suivantes, après un moment d'hésitation, passent sur leurs cadavres et leurs implacables ondulations progressent toujours plus avant. Tout cela n'est que métaphore : et il ne faut pas s'imaginer que chaque tribu supplante celle qui la précède de la même manière qu'un clou chasse l'autre. Ne venons-nous pas de voir que les Hiong-nou eux-mêmes, en dépit de leur réputation bien établie de férocité, n'ont pu vider leur région de l'Asie de la totalité des Yue-tche ? Même en admettant que des substitutions de ce genre soient à peu près réalisables dans les vastes solitudes de la steppe, elles n'étaient sûrement pas de mise dans des pays fortement colonisés par des Iraniens sédentaires, tels que l'étaient depuis longtemps la Sogdiane et la Bactriane. Déjà dans la Scythie de par delà l'Imaüs (ici le T'ien-chan), les Tokhâriens avaient dû laisser sur place, voire même s'incorporer une partie des peuplades que leur intrusion tendait à déloger. En tout cas, lorsque de ce côté des Monts Célestes ils pénètrent au pays des Çakas proprement dits, nous croyons mieux savoir ce qui se passe. Sous leur poussée, ou plutôt sous celle des tribus scythes qu'ils talonnent, et que les historiens classiques nomment pêle-mêle avec eux (o), la digue protectrice de la civilisation, que Cyrus avait édifiée et qu'Alexandre avait réparée sur l'Yaxarte, cède, et du premier coup se trouve ramenée sur l'Oxus. Ici il nous