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『東洋文庫所蔵』貴重書デジタルアーカイブ

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0082 La Vieille Route de l'Inde de Bactres à Taxila : vol.2
インドからバクトリアのタキシラに到る古道 : vol.2
La Vieille Route de l'Inde de Bactres à Taxila : vol.2 / 82 ページ(カラー画像)

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doi: 10.20676/00000237
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LES GRANDES INVASIONS

iranien traditionnel) étaient condamnés à périr en dépit de l'aide que leur apportèrent contre l'ennemi commun les autres râjas de l'Inde. Mais ils ne tombèrent pas sans avoir noblement combattu et avoir forcé leurs implacables adversaires à rendre hommage à leur courage chevaleresque. Al-MIûnt .est d'accord avec Kalhana pour nous dire quelle profonde commotion provoqua dans toute la région du Nord-Ouest la totale destruction de leur dynastie : à juste titre, car, avec elle, c'était le dernier rempart de l'Inde qui s'écroulait (12).

Il est difficile de parler en termes aussi élogieux de leurs ennemis. Les champions que leur oppose l'Islam n'avaient d'ailleurs rien à voir avec les descendants des compagnons du Prophète : c'étaient des « esclaves turcs » — et, soit dit en passant, l'historien kaçmîri a donc toutes raisons d'ignorer les Arabes et de continuer à ne nous parler que de « Turushkas ». Achetés ou non au bâzâr, fils de prisonniers de guerre ou mercenaires, ces « esclaves » convertis emplissaient alors les cours musulmanes et y occupaient les postes les plus divers, depuis celui de simple mamelouk jusqu'à celui de vizir, comme si le plus clair de ce que l'Orient proche conservait encore d'énergie s'était réfugié dans leur cerveau et dans leurs mains. A distance, ils nous apparaissent comme les fourriers de cette terrible invasion des Turcs seldjoucides, qui allait bientôt balayer toute l'Asie antérieure, qu'elle fût sâmânide, abbasside, fâtimite ou byzantine, et provoquer en Europe, comme choc en retour, le mouvement des Croisades. C'est à l'imprudence des émirs Sâmânides de Bokhârâ que les nouveaux maîtres de la région indo-iranienne doivent l'origine de leur surprenante fortune. Devenu, par la faveur d'un des émirs, chef de sa garde et gouverneur du Khorâsân, puis disgrâcié par son successeur, Alp-tegîn dut aller chercher un refuge jusqu'à Ghaznî, où il se maintint (961). Il paraît d'ailleurs n'avoir été qu'un rude condottière satisfait de pressurer de façon exorbitante ses propres sujets. Son gendre Säbük-tegîn s'aperçut qu'il valait mieux les enrichir aux dépens d'autrui, et découvrit quelle source inépuisable de revenus pouvait être la guerre sainte. Mais c'est le fils de ce dernier, Mahmûd, qui organisa méthodiquement cette fructueuse industrie. Presque chaque année, au retour de la saison froide, si dure dans sa capitale haut perchée de Ghaznî et si agréable dans l'Inde, il se mettait en branle, traînant après lui un nombre toujours croissant d'aventuriers recrutés parmi les tribus afghanes ou accourus de l'Asie centrale; puis, après une razzia de plus ou moins grande envergure, dès l'approche de la saison chaude, intolérable dans la plaine pour les montagnards et si délicieusement fraîche à l'altitude de 2.000 mètres, il revenait à son aire, chargé des dépouilles sanglantes des temples et des palais indiens. La tradition locale veut que le partage de ces trésors à grand renfort de coups de maillet s'opérât à But-khâk, bourgade située à 13 kilomètres à l'Est de Kâbul et dont le nom est compris comme signifiant « Poussière-d'idoles ». Dix-sept fois, à bien compter, pendant un règne de 33 ans (997-1930), Mahmûd promena ainsi les horreurs d'une dévastation systématique du Kangra à Somnâth et vers l'Est, jusqu'à Mathurâ et Kanauj ; et peut-être (ayons le cynisme de l'avouer) lui eût-il été beaucoup pardonné par les historiens si, comme Bâbur, il avait fondé un empire durable et nous avait laissé d'intéressants « Mémoires ». Mais, au total, que resta-t-il de tant de richesses enlevées ou détruites et de tant de sang répandu ? Le fruit toujours renouvelé de ses pillages n'empêcha pas l'avare sultan de lésiner sur la pension d'un admirable poète comme Firdausî et d'un grand savant comme Al-bîrûnî; sa capitale, si embellie qu'elle fût, resta, comme l'événement se chargea bientôt de le prouver, à la merci d'un coup de main et devait être à son tour livrée aux flammes, victime d'une vendetta afghane, 127 ans après sa mort; et, en fin de compte, c'est à peine si une partie du Panjâb demeura définitivement annexée aux pays d'Islam (13).