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『東洋文庫所蔵』貴重書デジタルアーカイブ

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0095 La Vieille Route de l'Inde de Bactres à Taxila : vol.2
インドからバクトリアのタキシラに到る古道 : vol.2
La Vieille Route de l'Inde de Bactres à Taxila : vol.2 / 95 ページ(カラー画像)

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doi: 10.20676/00000237
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LES CULTES LOCAUX   261

l'occasion de dire quel parti l'état-major macédonien, toujours soucieux de soutenir le moral de l'armée au cours de son interminable anabase, avait aussitôt tiré de cette fiction à laquelle sculpteurs hellénistiques et poètes alexandrins devaient assurer plus tard une si belle fortune (19). Les hellénistes nous excuseront d'expédier si vite, et avec une si parfaite incrédulité, le thème inépuisable, mais évanescent, du « Bacchus indien ». Tout ce qui vaut la peine d'être noté ici c'est comment, en pleine période historique, grâce à l'interprétation imaginaire d'une analogie réelle, puis à la mise en scène consciente de cette chimère, a pu naître, se propager et s'amplifier, comme entre deux miroirs conjugués, ce mythe, simple reflet d'un mirage. Mais si, comme Erato-sthène ne s'était pas gêné pour le déclarer, du point de vue grec cette assimilation et son cortège de conséquences supposées n'était que fantasmagorie pure, du point de vue indien elle apporte au contraire un renseignement précieux sur la religion, par tant de côtés dionysiaque, de Çiva, telle qu'elle se pratiquait dans les montagnes du Nord-Ouest au Ive siècle avant notre ère.

Pouvons-nous en saisir quelque indice encore plus ancien ? Naguère nous aurions été condamnés d'avance à le chercher, et qui pis est,' à le trouver dans le Vêda, puisque, par définition, toute l'antiquité religieuse de l'Inde était vêdique. De fait, l'ordre chronologique appellerait à présent les plus anciens textes brahmaniques : mais mieux vaut réserver leur examen pour tout à l'heure et remonter de suite jusqu'aux trouvailles archéologiques qui en ont récemment bouleversé l'interprétation. De même qu'un grain de sable, en se plaçant mal, peut modifier l'avenir de l'histoire, quelques menus fragments intaillés ou estampés de pierre ou d'argile sont susceptibles, en sortant de terre, de transformer à nos yeux l'horizon du passé. Entre tous les sceaux exhumés à Mohen-jo-Daro un seul suffit à établir l'existence dans le bassin de l'Indus, bien des siècles avant l'immigration des tribus védiques, du culte de Çiva, le dieu ityphallique à trois faces, le Grand ascète (Mahd-yogin), et le Maître des bêtes (Paçu-bati). A cette preuve aussi péremptoire que fragile s'ajoute, il est vrai, le témoignage massif et contemporain de nombreux symboles phalliques, linga et bétyles, trouvés au même endroit ou dans les couches correspondantes de Harappa (20). Ces trouvailles à leur tour achèvent de fixer le sens qu'il faut attribuer au nom appliqué aux Dasyus dans deux hymnes à Indra, dont l'un les bannit des cérémonies aryennes, tandis que l'autre les voue à la destruction, eux et leurs villes. Il n'est plus possible d'ergoter davantage : ces çiçna-dêva sont bien des gens qui « ont l'organe viril pour dieu », ou, comme nous dirions, pour fétiche (21). Du même coup se trouve

confirmé le pressentiment qu'à contre-cœur nos maîtres se croyaient obligés de repousser : à l'origine de ce que nous savons de la mythologie de l'Inde du Nord et de l'Ouest nous pouvons poser la figure pré-védique de Mahêçvara comme étant celle du plus grand et du plus populaire de ses dieux.

I. (P. 254). Voir les travaux de M. ELPHINSTONE, An Account of the Kingdom of Caubul, 9 II, p. 427 et suiv., et les études spéciales de J. BIDDULPH, Tribes of the Hindoo-Koosh (Calcutta, 188o), et de G. S. ROBERTSON, The Kâ/irs of the Hindu-Kush (Londres, 1896).

  1. (Do). Nous avons déjà attiré l'attention sur ce point dans la préface du livre de R. C. KAK, Ancient Monuments of Kashmir (Londres, 1933), p. xi-xtl1.

  2. (Do). Sur le Sari-Makh@-Dhcêrî ou Hâritî-stdpa, v. les Notes sur la Géographie ancienne du Gandhdra dans B. E. F. E.-0., 1, 1901, p. 347 (trad. anglaise dans les publications de l'Arch. Survey of India, Calcutta, 1905, p. 18); AgbG., II, p. 132 s.; Sur la frontière tndo-afghane (Paris, 1901), p. 104. — Une enquête, qui pourrait être récompensée, reste à faire en temps opportun sur le prétendu tombeau de Lamech, au Laghmân (supra, p. 35 et 15o).

  1. (P. 255). J. PRZYLUSKI, Le Nord-Ouest de l'Inde dans le Vinaya des Mdla-Sarvâstivâdin et les textes apparentés, dans J. A., nov.-déc. 1914, p. 493 s. — Sylvain LLv1, Notes chinoises sur l'Inde (B. E. F. E.-O., notamment V, 1905, p. 262 s.); Le Catalogue géographique des Yaksa dans la Mahâmdy&rî (J. A., janv.-févr. 1915, p. 19 s.).

  2. (Do). Sur les attaches magadhiennes du Nâga Apalâla, V. PRZYLUSKI, toc. laud., p. 512, n. I, et 559. Cf. HIUAN-TSANG, tracl. J., I. p. 133; B., I, p. 122; W., I, p. 229; et AgbG., I, p. 544 s. — Nous avons déjà eu l'occasion d'étudier l'acclimatation au Gandhâra des légendes de l'Inde centrale, ibid., II, p. 412 s.

  3. (Do). Sur les Nâgas G6pâla et Elapatra, v. à présent J. Ph. VoGEL, Indian Serpent Lore (Londres, 1926), p. 120 et p. 105 et 207.

  4. (Do). Sur le Yaksha Vajrapâgi, cf. AgbG., II, p. 40 s.,