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0115 La Vieille Route de l'Inde de Bactres à Taxila : vol.2
La Vieille Route de l'Inde de Bactres à Taxila : vol.2 / Page 115 (Color Image)

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doi: 10.20676/00000237
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LA PROPAGANDE BOUDDHIQUE

un « ancien roi » qui a érigé le stûpa situé juste à l'Est des grandes images. A Bactres, c'est «un ancien roi » (18) qui a fondé le fameux monastère dit le Nava-vihâra... Or, à qui fera-t-on croire que les cicerones de ces sanctuaires ne leur auraient pas donné le lustre d'un glorieux fondateur, si leur postériorité par rapport à Kanishka n'avait pas été reconnue de tous ? Qui sont en effet ces « anciens rois » dont le nom était ainsi tombé dans l'oubli, sinon les anonymes successeurs que nous ne connaissons nous-mêmes que sous la vague dénomination de « Kushâns tardifs » ? Aussi les fameuses statues rupestres de Bâmyân nous ont-elles donné l'impression de ne pas être antérieures au ne siècle après notre ère : et c'est au plus tôt vers la fin de ce siècle ou au début du suivant que nous placerions les grandes fondations bouddhiques de Bactres, si du moins l'on- tient absolument — ce qui n'est pas nécessaire — à ce qu'elles soient toutes antérieures à la reconquête iranienne menée par les Sassanides vers 23o après J.-C. (supra, p. 227). De cela aussi nous aurons à nous souvenir au cours du prochain chapitre.

On nous excusera d'autant plus aisément d'avoir suivi pas à pas la lente marche de cette propagation qu'il était nécessaire de freiner la hâte des philologues de cabinet, trop volontiers dédaigneux des obstacles naturels et impatients des temporisations nécessaires. Il est si facile et si vite faite de convertir au bouddhisme d'un seul trait de plume la Bactriane en même temps que le Gandhâra. En pratique nous venons de voir qu'il n'a pas fallu moins de quatre siècles (250 av.15o ap. J.-C.) et de trois étapes (plaine, puis versant sud et enfin versant nord de la grande chaîne) avant que la Bonne-Loi devînt dans le bassin de l'Oxus, en attendant celui du Tarim, capable d'attester sa présence par des édifices cultuels durables. Ceci bien entendu, est-il nécessaire d'avertir le lecteur que ni les contrées ni les périodes successivement envisagées ci-dessus ne comportent de cloisons étanches ou d'échéances fixes ? Cela serait trop commode pour l'historien. Il va de soi que si la piété bouddhique n'a pas été en état de se manifester pleinement au Gandhâra avant Açoka, ni au Kapiça avant Kanishka, elle a longtemps continué de le faire après eux. En fait « la plus haute pagode » de l'Inde du Nord était celle que Kanishka avait fondée auprès•de sa nouvelle capitale de Purushapura (Peshâwar), et les environs de Jelâlâbâd sont semés de stûpa « nouveau style ». De même au Kapiça les moines attribuaient aux « anciens rois », c'est-à-dire à des Kushânas tardifs plusieurs des couvents voisins de Kâpiçi, dont l'un était devenu particulièrement célèbre (supra, p. 245). En dépit de l'invasion des Huns et jusqu'à la conquête musulmane, le bouddhisme devait subsister plus d'un millénaire dans la région du Nord-Ouest : mais que le progrès de sa pénétration ait bien été tel que nous venons d'essayer de le décrire, la preuve nous en paraît marquée sur lG terrain, inscrite dans les textes et proclamée par les monuments.

Le voici cependant parvenu à Bactres, c'est-à-dire à la limite de notre prospection : mais si nous ne nous permettons pas de le suivre au delà, nous ne pouvons du moins escamoter la question de savoir quelle direction il va prendre ensuite. Bactres était en effet, sinon à proprement parler un carrefour (car, voyez la carte de la fig. 2, les routes du Nord et de l'Est finissaient par se confondre avant d'atteindre la Chine), à tout le moins un trivium. Arrivant par le Sud de l'Inde, son pays natal, le bouddhisme aurait pu aussi bien prendre la route de l'Ouest, qui l'eût conduit à travers l'Irân jusqu'à l'empire romain, que celles qui le menèrent par l'Asie centrale jusqu'en Extrême-Orient. Pourquoi a-t-il choisi celles-ci à l'exclusion de celle-là ? — A cette question on ne peut guère apporter de réponse qui n'implique la solution d'un autre problème symétrique et contemporain du premier. Songez que nous sommes au début du me siècle de notre ère, c'est-à-dire à une époque où le christianisme — né, lui aussi, en Asie — avait entrepris de son côté, avec le succès que l'on sait, l'évangélisation des Gentils. Pourquoi la propagande chrétienne s'est-elle dès le début orientée vers Rome et a-t-elle envahi l'Europe à l'exclusion, ou peu s'en faut, de l'Asie

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