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0125 La Vieille Route de l'Inde de Bactres à Taxila : vol.2
La Vieille Route de l'Inde de Bactres à Taxila : vol.2 / Page 125 (Color Image)

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doi: 10.20676/00000237
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LES RÉACTIONS OCCIDENTALES SUR LE BOUDDHISME

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Inutile, dans l'espoir d'obtenir une réponse nette à cette question, de se retourner vers les intéressés : de part et d'autre silence complet sur cette rencontre. Mais ne le voit-on pas clairement de nos j,purs ? En vain nombre de missions sont-elles incessamment envoyées par l'Europe, à qui d'ailleurs l'Asie s'apprête à rendre enfin la pareille : trop différents dans leur dogmatique, trop semblables dans leur morale, jamais le christianisme ni le bouddhisme n'ont réussi à mordre profondément l'un sur l'autre. Ne nous attendons donc pas à ce qu'il nous revienne aucun bruit ni de conversions en tel ou tel sens, ni même de polémiques réciproques : mais, pour tacites qu'elles soient restées, n'y a-t-il pas eu de relations doctrinales entre les deux Églises ? Du début du Me à la fin du ye siècle l'une et l'autre travaillent, sous l'influence, partout répandue de la gnose, à se fabriquer ce qu'elles ne possédaient pas encore, ce qui était même la dernière chose que leurs fondateurs respectifs eussent songé à leur léguer, à savoir une métaphysique. Leurs spéculations prennent, il va de soi, une tournure fort différente, plus critique dans l'Inde, plus pragmatique en Asie mineure. Tandis qu'un Nâgârjuna ou qu'un Asariga s'appliquent à dissoudre la réalité de l'univers sensible en un nihilisme ou un idéalisme transcendantal, les Pères de l'Église grecque s'efforcent avant tout de mettre sur pied leur théodicée trinitaire. Mais il est au moins un problème commun auquel docteurs chrétiens et bouddhistes -devaient fatalement se heurter au seuil de leurs méditations philosophiques : Comment expliquer la coexistence en une seule et même personne, celle de leur Maître, de l'humanité du personnage historique avec la divinité du Sauveur théologique ? Nous avons déjà dû signaler (supra, p. 285) le parti qu'avaient pris de bonne heure les Lokottaravâdin d'attribuer au Buddha un caractère purement surnaturel. C'était nier la question pour la résoudre et, en langage chrétien, professer l'hérésie docétique (ier siècle). Mais si la doctrine orthodoxe devait sortir, ici comme là, d'un effort de conciliation, elle n'en était pas pour cela plus facile à trouver. Nous n'avons pas à entrer dans les longues discussions qui divisèrent les théologiens d'Occident et semèrent la zizanie dans leurs conciles : le lecteur sait où en chercher l'exposé. Ce que peut-être il sait moins, c'est que les mêmes questions furent également débattues dans les cercles bouddhiques et aboutirent à une solution analogue — seulement, more indico, plus subtile. Au lieu de se perdre dans des querelles sans issue à l'instar des monophysites versus les dyophysites, les docteurs du Mahâyâna se firent « triphysites » : en d'autres termes, ils tombèrent d'accord pour inventer une troisième « nature » mixte qui, servant de transition entre les deux autres, la divine et l'humaine, aidait tant bien que mal à combler l'abîme qui sépare celles-ci. Ainsi naquit la théorie bien connue des trois kâya ou, comme on traduit d'ordinaire, des « trois corps » du Buddha. Dès 1913, M. Masson-Oursel a montré que ce mot kâya est en fait dans la bouche des Mahâyânistes l'équivalent sanskrit du mot grec physis dans celle des Jacobites ou des Nestoriens. Malheureusement, au moment où écrivait l'excellent connaisseur de la philosophie orientale, le Mahâyâna-çraddhot/âda passait pour être une oeuvre d'Açvaghosha et par suite pour remonter au début du He siècle de notre ère, ce qui coupait court à toute supposition d'un lien immédiat entre les vues qui s'y trouvaient exposées et celles que Théodôre de Mopsueste (350-428) ne devait mettre en circulation que près de trois cents ans plus tard. A présent que l'érudition japonaise a fait redescendre ce traité bouddhique jusqu'au ve siècle, ce malencontreux obstacle tombe et l'ordre naturel des choses se rétablit. Nous laisserons à de plus experts la question de savoir si l'indéniable rapport qui existe entre la christologie byzantine et la bouddhologie de la période Gupta doit être classé comme un fait de syncrétisme ou seulement de parallélisme : ce qui est désormais avéré, c'est leur syn-

chronisme (9).

LE BOUDDHISME ET LA GNOSE. - Nous restons persuadés que des recherches plus serrées