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0185 La Vieille Route de l'Inde de Bactres à Taxila : vol.2
La Vieille Route de l'Inde de Bactres à Taxila : vol.2 / Page 185 (Color Image)

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doi: 10.20676/00000237
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LE MODELAGE   351

Telle est au moins la façon dont après tantôt cinquante ans d'études entrecoupées de voyages nous en sommes venu à concevoir l'histoire de l'école du Gandhâra. Quand, à la fin du siècle dernier, nous visitions pour la première fois, après les collections d'Angleterre et de l'Inde, le pays de leur provenance, nous comptions bien en rapporter une explication satisfaisante pour les autres comme pour nous de cette sorte de marcotte de l'art grec, reprenant racine sur les bords de l'Indus et poussant à son tour ses rameaux jusqu'aux limites océaniques de l'Asie. Nous avons fait ce que nous avons pu pour inventorier son répertoire, interpréter ses bas-reliefs, identifier ses statues et déterminer, après la date de ses débuts, la courbe de ses destinées. On vient de lire un aperçu sommaire des conclusions auxquelles nous avons abouti : mais nous ne sommes plus assez jeune pour les croire définitives. L'avenir ne manquera pas de modifier certaines perspectives en même temps qu'il éclairera bien des points restés obscurs : nous doutons seulement qu'il parvienne à percer à fond le mystère de cette création hybride et puisant dans son métissage même le charme de son individualité comme le ressort (le sa propagande. Il y a, semble-t-il, dans les phénomènes de l'art comme dans ceux de la vie, un dernier secret rebelle à l'analyse et inaccessible à l'entendement humain. Les sciences historiques et biologiques peuvent décrire les faits ou les phénomène; et établir des rapports entre eux : elles ne pénètrent pas au coeur même de leur objet. Diafoirus a toujours raison : une fois que les observations physiologiques ou les expériences chimiques sont closes, il reste que si l'opium fait dormir, c'est parce qu'il possède une vertu dormitive. De même au bout de nos longues disquisitions, nous sentons bien que nous nous heurtons à une sorte de noyau irréductible, à un « fait en soi » qu'on pourrait désigner comme la propriété locale de cette vieille terre du Gandhâra tour à tour fécondée par tant d'alluvions successives, indienne, iranienne, grecque et scythique — ou plutôt comme l'indice personnel de cette étonnante mixture de populations brassées par les siècles dans ce carrefour des routes asiatiques. Que le lecteur se rassure : notre intention n'est pas de crier à un « miracle gandhârien », succédané du fameux « miracle grec ». Mais nous sommes bien forcés d'admettre que la semence venue d'Occident a trouvé dans le sol de cette antichambre de l'Inde et le sang mêlé de ses habitants un terrain particulièrement favorable et des tempéraments remarquablement doués. Si le Gandhâra a créé, développé et propagé l'art gréco-bouddhique, c'est sans doute pour toutes les raisons d'ordre géographique, ethnographique, politique, religieux et commercial que nous venons si laborieusement d'exposer; mais c'est aussi, et surtout, parce que — telles la Toscane, les Flandres et l'Ile-de-France en Europe, tels le Japon et Java en Asie — il était ce qu'on est convenu d'appeler une « terre d'art », c'est-à-dire un de ces terroirs bénis du ciel qui produisent des tableaux et des statues aussi naturellement que d'autres des fruits, des étoffes et des machines. Le lecteur trouvera peut-être que nous avons mis bien longtemps à nous en aviser, et nous en tombons d'accord avec lui; mais peut-être avons-nous une excuse. Si à la question de savoir pourquoi il existe un art du Gandhâra nous avions commencé par répondre : « C'est parce que le Gandhâra avait une virtù artistique », il ne nous aurait pas pris au sérieux: et c'est pourtant là le fin mot de l'histoire.

  1. (P. 306). Aussi nous sommes-nous bornés à compléter les deux volumes de l'Art gréco-bouddhique du Gandhdra, dont le titre est ici abrégé en A gb G., par un fascicule d'Addenda et Corrigenda.

  2. (P. 308). Les deux sculptures reproduites sur la pl. XL ont déjà été publiées par M. J. HACKIN dans sa Sculpture indienne et tibétaine au Musée Guimet; mais elles se devaient de figurer ici comme pièces justificatives de l'extension de l'aire de l'École du Gandhâra dans la direction du Nord-Ouest, en attendant le renfort que viennent de leur apporter

les nombreuses trouvailles de M. J. MEuNig Shotorak (Mém. D. A. F. A., t. X, Paris, 1942, 40 pl.). — La stèle exhumée par M. J. HACKIN à Paït£v£ représente le • Grand prodige de çr£vasti ► : le Buddha debout accomplit les

  • miracles jumeaux • en faisant jaillir des flammes de ses épaules et ruisseler de l'eau de ses pieds. Sa main droite, levée dans le geste qui rassure, est marquée à la paume de la • roue de la Loi •. Se profilant sur le nimbe qui environne sa tete, Brahm£ à sa droite et Indra à sa gauche l'abritent avec un petit parasol. De chaque côté de ses épaules un