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0158 La Vieille Route de l'Inde de Bactres à Taxila : vol.2
La Vieille Route de l'Inde de Bactres à Taxila : vol.2 / Page 158 (Color Image)

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doi: 10.20676/00000237
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324   LES INFLUENCES ARTISTIQUES

qu'ainsi replongées dans l'ambiance générale de ce que nous appelons l'Orient. Assurément celui-ci n'a pas été partout pénétré à une égale profondeur par la civilisation hellénistique. A ce point de vue aussi il reste divisé entre les diverses zones géographiques que l'on s'accorde à délimiter. Mésopotamie, Iran occidental et région indo-iranienne ont subi à des degrés différents une influence de plus en plus atténuée à mesure qu'elle s'éloignait davantage du foyer d'Anatolie et de Syrie. Mais c'est le même esprit d'imitation spontanée et d'adaptation volontaire qui souffle depuis l'Euphrate jusqu'à l'Indus, voire jusqu'au Gange. Et là même ne se borne pas ce que nous avons à dire : car à ce point de l'histoire de la civilisation de l'Ancien monde, l'indianiste vient relayer l'helléniste, puisque l'Inde des premiers siècles de notre ère a repris à son compte, en même temps que le rôle d'institutrice des nations joué parla Grèce dans l'Orient proche, la propagation du courant occidental jusqu'en Extrême-Orient. Pour ne nous attacher qu'à la manifestation la plus visible et tangible, l'art hellénistique, profitant de la force d'expansion de la religion bouddhique, a connu un renouveau d'influence sous la forme indianisée qu'il avait reçue au Gandhâra, et est reparti de cette sorte de foyer secondaire pour s'étendre jusqu'aux rivages et même jusqu'aux îles du Pacifique. Sur toutes les images des divinités locales sa marque se retrouve, presque aussi nettement visible au Japon et à Java que, vers la direction opposée, sur les bords de l'Atlantique et dans l'ultime Thulé. Mais peut-être avons-nous consacré ailleurs assez de pages à la démonstration de ce fait capital pour qu'on nous dispense d'y revenir (12). I1 importait toutefois de le rappeler ici : le Gandhâra n'a été le point de départ de cette sorte de rebondissement de l'influence hellénistique que parce qu'il avait commencé par être le point d'aboutissement de celle-ci dans le grand Drang nach Osten mis en branle par le génie d'Alexandre.

Plus encore que de l'ampleur de ce mouvement, il convient de se souvenir de sa longue durée : • c'est encore là un point sur lequel tous les historiens de l'hellénisme sont d'accord avec les orientalistes. Les Séleucides peuvent disparaître après cent cinquante ans à peine d'une domination traversée par bien des dissensions et des revers : le germe qu'ils ont semé leur survivra et persistera à fleurir non seulement dans la Syrie devenue romaine, mais dans la Mésopotamie et l'Irân passés aux mains des Parthes. — A cela rien d'étonnant, dira-t-on peut-être : que ce soit par politique ou par sentiment, les Arsacides ne s'intitulent-ils pas « philhellènes » ? Mais que surviennent les Sassanides (220 ap. J.-C.) et avec eux la véhémente réaction politico-religieuse du vieux nationalisme persan, qu'adviendra-t-il alors de ce vernis de civilisation étrangère, un instant répandu sur la surface de la contrée ? — Qu'il s'écaille par endroits, cela ne fait pas de doute : mais nous avons maintes indications, tant artistiques que littéraires, qu'il continue à subsister, si même les constantes relations avec l'empire byzantin, au cours de leurs alternatives de belligérance et de concorde, ne contribuent pas sur certains points à le renforcer. La preuve en est qu'il atteint son plus grand éclat sous le règne des deux « Chosroês », et que les Arabes eux-mêmes recueilleront, à tout le moins dans l'ordre scientifique, la meilleure part de cet héritage.

A quel point ces informations et ces observations en partie nouvelles sont ici à leur place, on en jugera si nous les appliquons sans plus tarder à notre sujet particulier. Le trait le plus saillant est l'espèce de solidarité qui s'établit aussitôt sous nos yeux, sans même qu'il soit besoin de recourir à l'évanescent intermédiaire bactrien, entre l'école du Gandhâra et les écoles contemporaines d'Antioche et de Palmyre, de Suse et de Séleucie. Nous ne saurions assez le répéter, car il faut bien nous mettre dans l'esprit que nous ne nous ferons une idée nette de l'élaboration de l'art indo-grec que quand nous connaîtrons à fond l'art gréco-iranien. Le malheur veut qu'à présent nous le connaissions mal, et ainsi le récent enrichissement de nos connaissances se solde surtout par une traite à longue échéance sur l'avenir. Du moins chaque jour les découvertes nous