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0132 La Vieille Route de l'Inde de Bactres à Taxila : vol.2
La Vieille Route de l'Inde de Bactres à Taxila : vol.2 / Page 132 (Color Image)

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doi: 10.20676/00000237
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LES PROPAGANDES RELIGIEUSES

suspects d'hérésie, que saint Éphrem (mort en 373) inonde des siens la littérature syriaque, tandis que saint Grégoire de Naziance et Synésius composent les leurs en grec. Toutefois c'est seulement au Ive siècle, nous apprend saint Augustin, au temps de la persécution des orthodoxes par les Ariens sous l'impératrice Justine, que le même usage s'introduisit en Italie. Tandis que saint Ambroise et ses ouailles veillaient réfugiés dans la cathédrale de Milan, « il fut institué que, selon la coutume des pays d'Orient, des hymnes et des psaumes seraient chantés pour éviter que l'accablement de la douleur ne démoralisât les fidèles : et cette innovation s'est conservée et elle s'est depuis lors répandue un peu partout dans presque toutes les églises ». Si nous nous tournons à présent du côté de l'Inde, on nous fera peut-être observer qu'il n'est aucun besoin de parler de l'imitation des sectes gnostiques ou chrétiennes; car si ces dernières continuaient spontanément la tradition juive des psaumes de David, les anciens bouddhistes n'avaient de leur côté qu'à se rappeler le précédent non moins vénérable des hymnes vêdiques. — Sans doute, mais comme ils ne le firent pas, il devient superflu d'exposer toutes les raisons qu'ils avaient de n'en rien faire. Écoutons plutôt ce que déclare le grand connaisseur du vieux canon pâli, T. W. Rhys Davids : Si le mot hymne veut dire « un poème en stances écrit pour être chanté à l'office devant la congrégation assemblée, les bouddhistes qui n'ont ni église, ni chapelle, ni congrégation, ni offices, n'ont conséquemment pas d'hymnes... ». Ils n'en eurent pas en effet avant le He siècle de notre ère : mais quand subitement il leur en naît, nous sommes autorisés à penser que c'est encore à la suite de quelque rapport sur ce qui se passait là-bas « vers le Nord-Ouest » dans le Pays-des-Blancs .(Çvêta-dvî/a) oü des hommes vertueux savaient célébrer de façon si dévotieuse le culte de la Divinité. Un moment de réflexion découvre d'ailleurs que l'usage de ces effusions lyriques était l'accompagnement obligé de la diffusion contemporaine de la notion de bhakti (supra, p. 287) et devait partager la même vogue. A émotions nouvelles, manifestations inédites; et la modification de la liturgie allait naturellement de pair avec celle du sentiment religieux. Ajoutons que, pour son coup d'essai, l'Inde avait réussi un coup de maître. Les deux hymnes, l'un en 15o et l'autre en 40o stances, que Mâtriéêta avait composés en l'honneur du Buddha méritaient leur popularité et la conservèrent jusqu'au bout. Au vue siècle encore, nous dit Yi-tsing, on les faisait apprendre par coeur à tous les novices. On ne chantait pas à proprement parler ces stôtra et les innombrables imitations que leur succès avait provoquées : on les déclamait à la mode indienne sur une mélopée uniforme, commandée par le rythme des strophes; mais il paraît que rien n'avait plus de charme pour les moines assemblés que de se laisser bercer dans le calme des soirs par la récitation d'une de ces pieuses cantilènes (18).

Nous croyons donc relever deux cas caractérisés et datés d'emprunts faits par l'Inde aux littératures occidentales : mais ces deux emprunts sont limités à l'adoption de simples cadres. Pouvons-nous, en poussant plus avant, discerner quelques rapports de fond, et non plus seulement

de forme, entre les volumineux et fastidieux ouvrages de propagande, tant gnostiques que bouddhiques, qui virent le jour aux Me et Ive siècles de notre ère dans le Proche et le Moyen Orient ? Tâche aussi énorme que rebutante, mais à laquelle il faudra bien qu'un exégète qualifié, et possédant à la fois le grec, le copte, le syriaque, le pehlvi et le sanskrit s'attelle quelque jour : car la philologie aussi a ses martyrs volontaires. Voici, en attendant, une expérience facile à réaliser : parcourez tour à tour et mettez en parallèle les études déjà parues indépendamment sous la plume des historiens spécialistes du gnosticisme ou du bouddhisme : vous ne pourrez manquer d'être frappés de l'étroite similitude des constatations et des appréciations que vous lirez de part et d'autre. Tout d'abord, c'est une erreur de croire que le Maître ait disparu et abandonné ses vrais initiés. Buddha ou Christ, il est encore au milieu d'eux, et il consent soit à dépouiller «son effulgence »