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0202 La Vieille Route de l'Inde de Bactres à Taxila : vol.2
La Vieille Route de l'Inde de Bactres à Taxila : vol.2 / Page 202 (Color Image)

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doi: 10.20676/00000237
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368   CONCLUSIONS

moins apparentées aux populations frontalières des quatre points cardinaux, et partagées au point de vue religieux par un schisme, mais qui n'en forment pas moins un bloc si solide que ses puissants voisins se sont usé les dents à l'effriter sur les bords. Où l'Afghânistân, comme la Suisse, puise son indéniable cohésion, ce n'est un mystère pour personne : faute d'être fondus dans une unité ethnique ou linguistique, ses habitants communient dans l'amour inné du montagnard pour la liberté. Il faut voir avec quelle ferveur unanime ce peuple fête chaque année l'anniversaire de son indépendance (istiglâl). Son courage viril, son ardeur à s'instruire, le désir de progrès qui anime son gouvernement — et dont le souci de ses antiquités nationales fournit au monde une preuve de plus — lui méritent à coup sûr, après tant de vicissitudes, un avenir de prospérité dans la paix, la concorde et, ce qui lui est plus cher que tout, dans l'honneur ('izzat).

ORIENT ET OCCIDENT. - Cet abrégé des événements et des leçons du passé montre de façon assez frappante à quel point leur étude peut être utile aux chefs d'armée comme aux conducteurs de négociations, aussi bien dans les camps qu'autour des tables de conférence. Il invite également les scholars à se livrer dans leur cabinet de travail à des spéculations que beaucoup jLgeront oiseuses, mais qui ont pour elles d'être inoffensives parce que désintéressées. Prophètes après coup, ils sont en mesure de lire rétrospectivement les destins que la géographie avait d'avance écrits sur la face de cette région indo-iranienne qui devait être le théâtre de tant d'invasions, en même temps que, grâce à l'histoire, ils voient mieux que les envahisseurs eux-mêmes à quel point leur action dépasse les bornes de leur horizon et les buts que s'assignait leur égoïsme. Mais puisqu'il est ainsi possible de confronter les mises en scène successives et de supputer la portée comme les limitations du rôle des principaux acteurs qui défilent à leur tour, comment n'en pas venir à se demander si la pièce qui se jouait n'aurait pu prendre une tournure moins uniformément tragique et suivre un cours plus favorable au progrès comme au bonheur de l'humanité ? La tentation de se poser cette question devient particulièrement forte aux rares moments où, un intermède quasi idyllique s'intercalant entre deux catastrophes, le spectateur du drame est prêt à s'écrier avec l'amoureux poète : « O temps, suspends ton vol... ». Hélas, ces « heures propices » sont aussi exceptionnelles que brèves; et c'est tout juste si, au cours des quinze cents ans que Mus avons passés en revue, nous pouvons en retenir deux. La mieux connue, bien que la plus ancienne, brille au lendemain de l'expédition d'Alexandre, quand pour un court instant un heureux équilibre et des relations courtoises s'établissent entre Séleucides et Mauryas. Les Indo-Grecs eux-mêmes, une fois leurs ambitions satisfaites et leurs discordes apaisées, auraient servi la cause de la civilisation eurasienne, si les Nomades n'étaient venus couper court à ce tête à tête qui eût pu être si fécond, et qui n'a pas été entièrement stérile, entre l'Inde et la Grèce. Hellénistes et indianistes ont déjà retourné sous toutes ses faces, avec un égal intérêt de part et d'autre, cet épisode passionnant pour eux : peut-être n'ont-ils pas assez remarqué que, six cents ans plus tard, dans l'orageuse histoire du Moyen-Orient s'est produite une seconde éclaircie qui ne mériterait pas moins d'être étudiée dans ses circonstances comme dans ses résultats..

Celle-ci luit dès le me siècle de notre ère avec la renaissance perse sous les Sassanides et jette son plus vif éclat lors de l'inauguration de l' « âge d'or » de l'Inde sous les premiers Guptas. La paix qui règne constamment entre les deux dynasties est-elle fondée sur un respect mutuel, ou due à l'épaisseur des états-tampons qui séparent leurs domaines respectifs ? Toujours est-il qu'à la faveur de cette trève — que vinrent malheureusement troubler les Huns et les Turcs, ceux-ci d'ailleurs moins rébarbatifs que ceux-là — le mouvement des échanges économiques et culturels reprend de plus belle, par terre comme par mer, entre le Levant et le Moyen-Orient