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0165 La Vieille Route de l'Inde de Bactres à Taxila : vol.2
La Vieille Route de l'Inde de Bactres à Taxila : vol.2 / Page 165 (Color Image)

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doi: 10.20676/00000237
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LIS FACTEURS ARTISTIQUES

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terons pas à notre tour à appeler l'iranisation de l'Inde du Nord nous donne la clef de l'introduction dans le répertoire du Gandhâra de tous ces motifs, merlons, ornements en chèvrefeuille, chapiteaux campaniformes avec ou sans taureaux adossés, griffons, animaux fantastiques à face humaine ou pourvus d'ailes schématisées, etc., dont le style perse ou assyro-perse est évident à tous les yeux. Aussi bien, quand nous constatons que ces décors figuraient déjà sur les balustrades de Barhut, de Bodh-Gayâ et de Sânchî, un petit détail vient-il aussitôt trahir leur origine. On a relevé en effet au revers ou sur la tranche de nombreux fragments des signes alphabétiques incisés par les sculpteurs pour servir de guide-ânes dans la mise en place de leurs oeuvres. Le fait que ces caractères sont empruntés à l'écriture kharoshthî dénonce aussitôt l'extraction de quelques-uns des rûpa-kâra qui sous les Çungas ont travaillé au coeur même de la péninsule : ils venaient de la région où cet alphabet s'apprenait à l'école, c'est-à-dire du Gandhâra ou du Haut-Panjâb; et du même coup nous tenons la preuve de l'existence dans le Nord-Ouest, au moins à partir du ne siècle avant notre ère, d'ateliers indo-iraniens qui ont essaimé jusque dans le bassin du Gange.

Ces investigations, on le voit, serrent notre sujet de plus près qu'on n'aurait pu croire La question de l'école bouddhique de l'Inde du Milieu, et celle de l'école gréco-bouddhique de l'Inde du Nord, de tout temps connexes entre elles, le sont devenues encore plus étroitement depuis que l'on s'est aperçu que les débuts de la seconde au Gandhâra étaient sensiblement contemporains du plein épanouissement de la première sur les portes monumentales de Sânchî. Toutes deux posent des problèmes analogues et réclament des solutions à tout le moins parallèles. En veut-on un exemple frappant ? Nous pouvons suivre à présent presque décade par décade pendant les deux siècles qui ont précédé notre ère, depuis les plus vieux médaillons du stûpa no 2 de Sânchi jusqu'aux panneaux les plus élaborés de la porte Ouest du stûpa n° r, en passant par les bas-reliefs de Barhut et de Bodll-Gayâ, le progrès continu de la sculpture bouddhique dans l'Hindûstân proprement dit : mais quelle place convient-il d'assigner dans cette évolution aux rares oeuvres du me siècle avant J.-C. qui ont survécu jusqu'à nous et que leurs inscriptions rapportent de façon indubitable à l'empereur Açoka ? A s'en tenir aux monuments connus, cet art commence par des chefs-d'oeuvre, souvent d'exécution et toujours de fini, tels que les chapiteaux des colonnes de Sârnâth et autres lieux : mais ensuite il se poursuit sur les balustrades des stûpa par des essais maladroits et quasi « primitifs », comme si, né en pleine possession de ses moyens, il les avait tout à coup perdus pour ne reconquérir qu'avec lenteur une technique destinée à rester toujours inférieure à sa maîtrise initiale. Il y a sûrement là une énigme à laquelle on ne voit pas d'autre solution que celle qui a déjà été proposée par Sir John Marshall (Camb. Hist. of India, I, p. 618 s.). Elle consiste à mettre, pour ainsi dire, « hors concours » l'art impérial d'Açoka comme dû à une main-d'oeuvre exceptionnelle et passagère; et ainsi il en serait de ses plus beaux « memorials » comme des monnaies des premiers rois indo-grecs, lesquelles ne s'alignent pas davantage avec les productions subséquentes des ateliers du Nord-Ouest (cf. supra, p. 31o). L'écart n'est guère moins grand entre les médailles des Euthydèmides et le meilleur Buddha gandhârien qu'entre le chapiteau de Sârnâth et le pilier le mieux tourné de Barhut. Ces commandes princières, passées à des artistes d'élite et mandés tout exprès d'Occident, restent un brillant épisode en tête et en marge de l'évolution routinière de l'art dans leurs régions respectives.

Un autre parallélisme non moins curieux se marque dans le fait que le développement des deux écoles décèle le même retard sur le régime politique auquel l'évidence des textes oblige de les rattacher. La raison en est simple. Tandis que les empires orientaux s'érigent et s'écroulent en un siècle ou deux, les mouvements sociaux qui finissent par s'épanouir sous forme d'oeuvres d'art ne s'élaborent qu'avec une lenteur déroutante pour l'impatience des philologues. Nous avons