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0191 La Vieille Route de l'Inde de Bactres à Taxila : vol.2
La Vieille Route de l'Inde de Bactres à Taxila : vol.2 / Page 191 (Color Image)

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doi: 10.20676/00000237
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LA RÉGION INDO-IRANIENNE   357

dialecte de la langue parlée par ses suppôts d'alors, les a avares Panis », qu'emploient encore les Brâhûî ou « Montagnards » du Bélûchistân — le même dont ils se servaient déjà au temps de Strabon sous la désignation synonyme d' « Orites ».

Vers le xve siècle avant notre ère, les débris croulants de ce premier essai connu d'unification territoriale et culturelle auraient été submergés par l'immigration des Aryens, les barbares nomades d'alors. Leur afflux, longtemps endigué, est finalement partagé en deux branches par l'interposition de la barrière de l'Hindûkush. Vers le Sud-Ouest s'épandent les futurs Iraniens qui, sous le nom de Mèdes et de Perses, et non sans l'appoint de nouveaux renforts scythiques, détruiront les grands empires d'Assur et de Chaldée, et hériteront de leur civilisation. Vers le Sud-Est se déversent les futurs Indiens qui, de leur côté, absorberont la « civilisation de l'Indus », et qui, après avoir peuplé le Panjâb, coloniseront le reste de la péninsule en attendant l'Inde extra Gangem et l'Insulinde. Mais prenons-y-garde : les remous suscités par ce double courant au pied méridional du massif montagneux devaient fatalement remettre en présence les deux races soeurs, parlant encore des langues très voisines, néanmoins promptes à se découvrir ennemies et à le devenir jusque dans leurs dieux. Cela ne tarda évidemment pas à se savoir qu'avec les grasses plaines arrosées par les Cinq ou Sept Rivières, les Indiens avaient reçu la meilleure part ; et l'homme est ainsi fait que cette part devait leur être constamment et âprement disputée par leurs frères moins bien avantagés : car il ne faut pas oublier que, selon la boutade bien connue et demeurée vraie jusqu'à l'avènement de sa mondiale Seigneurie le Pétrole (nalt), « l'Irân n'était guère riche qu'en kilomètres carrés ». Nous avons cru ci-dessus (p. 186) pouvoir affirmer que les parties les plus fertiles de la région frontière, et notamment l'Arachôsie, ont été dès l'abord indianisées par les tribus vêdiques en même temps que le Panjâb. D'autre part, nous avons dû reconnaître qu'au cours des siècles c'est presque constamment l'Irân qui a fait sentir à l'Inde le poids de ses armes, et que les deux tiers occidentaux de la contrée en litige ont fini par être iranisés de langue comme de race jusqu'à la ligne, parallèle à l'Indus, des monts Suléimàn, et par places jusqu'à l'Indus même. Ainsi se dégage d'emblée la loi historique qui domine toute la suite des événements comme de leur exposé, nous voulons dire l'iranisation progressive de la région indo-iranienne. Ce sont les étapes de cette irrésistible poussée qu'il ne nous reste plus qu'à résumer.

Toutefois, il ne suffit pas de camper face à face les deux protagonistes, se disputant dans une lutte fratricide leur commune frontière : ainsi qu'on l'a vu, il faut encore compter avec leurs cousins plus ou moins éloignés demeurés dans la steppe, mais avides de suivre leurs traces, et que, pour abréger, nous avons englobés sous la vieille désignation persane de Tûrân. Comme dans un ballet bien réglé, chacun de ces acteurs fera à son tour son entrée, après quoi ils mèneront une sarabande générale : et le spectacle serait assez divertissant si à chaque fois la scène n'était inondée de sang et l'éclairage fourni par la lueur des incendies. Il faut en prendre son parti : au cinéma de l'histoire, c'est toujours le drame qui sévit. Le coeur cuirassé par l'habitude, l'historien s'inquiète uniquement de savoir comment le perpétuel retour de ces tragiques horreurs se distribue en périodes, heureux si elles s'y prêtent ; et c'est ce que nous avons tenté de faire ci-dessus. Ce qu'il nous faut à présent souligner, c'est qu'en pratique toutes les invasions énumérées dans notre chapitre Iv servent plus ou moins directement la cause de la pénétration iranienne. Pour la conquête des Achéménides et celle de leur continuateur malgré eux et malgré ses propres compagnons, nous voulons dire Alexandre, cela s'entend de soi; et après la courte réaction indienne des Mauryas au me siècle, l'avance des Indo-Grecs jusqu'au coeur du bassin du Gange promettait même d'attirer l'Inde dans le cercle d'attraction de la Méditerranée, et d'uniformiser largement sous une farinatura hellénique la civilisation du Moyen-Orient après celle de l'Asie antérieure. C'est à ce moment que la