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0143 La Vieille Route de l'Inde de Bactres à Taxila : vol.2
La Vieille Route de l'Inde de Bactres à Taxila : vol.2 / Page 143 (Color Image)

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doi: 10.20676/00000237
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LE BERCEAU DE L'ÉCOLE   309

ment fait du talweg des vallées les plus importantes et, en ce qui concerne le versant indien de l'Hindûkush, les mieux orientées dans la direction du Sud-Est. Par endroits, là où le talweg s'élargit, la civilisation s'étale en un lac de verdure semé de villages et donne dans les édifices religieux sa plus durable fleur. Parfois même, à la faveur de quelque vallée latérale, elle pousse au Nord ou au Sud des ramifications plus ou moins vigoureuses, ici vers le Vardak, là vers le Kunâr ou le Svât. Mais bientôt le défilé rocailleux et stérile la canalise à nouveau ; et il est curieux de voir comment ce chapelet d'oasis semble déjà préfigurer en montagne la description qu'on nous donne de la distribution des sites archéologiques le long des abords désertiques du Takla-Makan. Vérification faite de Bactres à Taxila, la plaine du Gandhâra reste plus que jamais à nos yeux l'élargissement de beaucoup le plus important au point de vue artistique aussi bien qu'économique, et c'est toujours chez elle que nous voyons le berceau et la terre d'élection de l'école indo-grecque. Assurément ce n'est là qu'un témoignage, et tout témoin est faillible : mais, quoi que vaillent ses impressions, il ne peut mieux faire que de les exprimer en toute sincérité (5).

II. LE BERCEA U DE L'ÉCOLE

Il ne faudrait d'ailleurs pas croire que nous ne pouvons apporter à l'appui de nos impressions de voyage aucun argument précis : nous en avons même qui sont décisifs. Ce n'est pas sans un dessein préconçu que nous nous sommes appliqués dans les précédents chapitres à retracer aussi exactement que possible les cadres politiques et religieux de l'évolution de l'« Inde du Nord » : le moment est venu de recueillir le fruit de nos patientes recherches en appliquant les connaissances générales que nous avons acquises au cas particulier de l'art indo-grec. Nous tenons en effet dans l'éclosion de l'école gandhârienne une donnée de premier ordre pour l'historien. On ne saurait souhaiter de fait social plus « représentatif », à raison de l'intérêt que l'homme, cultivé ou non, attache en tout temps et en tout pays à celles des manifestations de ses sentiments et de ses idées qui s'adressent directement au plus lucide de ses sens, celui de la vue; et ces formes extérieures de sa pensée ont en outre pour elles qu'empruntant à la matière une part de sa durabilité, elles en permettent l'étude à longue échéance. Mais cette manifestation ne saurait pour autant échapper aux lois géographiques et historiques qui régissent le destin de toute création humaine, et il est a priori possible — au point où nous sommes parvenus il devrait même être devenu facile — de la « mettre en place » dans la région indo-iranienne du Nord-Ouest.

A la vérité si nous n'interrogions à son sujet que la seule géographie, nous n'obtiendrions de celle-ci aucune réponse définitive. Riche de son expérience universelle, elle nous enseignerait assurément que, jamais ni nulle part, l'art n'a été une fleur de montagne ; et du même coup elle réduirait considérablement le champ des hypothèses. Un simple regard jeté sur la carte de la figure I suffit en effet à convaincre que le débat se ramène automatiquement à une compétition entre les deux vastes et riches plaines auxquelles aboutit à chacune de ses extrémités, au Nord et au Sud de la grande chaîne de l'Hindû-kush, la « vieille route » qui nous est devenue familière : d'une part le bassin moyen de l'Oxus, de l'autre celui de l'Indus. En d'autres termes, et pour donner leur nom aux deux seules rivales qualifiées, l'École en question n'a pu naître que dans l'une de ces deux provinces qui sont ou bien la Bactriane, ou bien le Gandhâra. Le problème s'en trouve évidemment très simplifié, mais on ne peut prétendre qu'il soit le moins du monde résolu : car à ce point la géographie nous abandonne sans autre forme de procès, et on croit l'entendre qui