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0160 La Vieille Route de l'Inde de Bactres à Taxila : vol.2
La Vieille Route de l'Inde de Bactres à Taxila : vol.2 / Page 160 (Color Image)

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doi: 10.20676/00000237
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326   LES INFLUENCES ARTISTIQUES

et des Sassanides, en opposant jusqu'au bout une barrière insurmontable à l'expansion jusqu'alors irrésistible de l'empire romain, ne témoignent-elles pas_ suffisamment de l'intensité de la réaction asiatique contre la prétention de l'Europe à la domination universelle ? — Ainsi se découvre dans notre exposé une autre lacune. Nous avons étudié de notre mieux les deux facteurs essentiels, l'un politique et l'autre religieux, dont le heurt a engendré l'hybride école gandhârienne; mais le lecteur informé se sera déjà étonné que nous n'ayons encore fait aucune place à un troisième, en l'absence duquel les deux autres n'auraient eu entre eux qu'un contact trop éphémère pour être aussi fécond, à savoir le facteur économique.

Là gît en effet la solution à nos dernières difficultés. Par tous les intérêts qu'il met en jeu et les relations suivies qu'il nécessite, le commerce, bien mieux que la guerre, crée les grands courants d'échanges qui charrient, pêle-mêle avec les marchandises, les idées et les images. C'est le constant va-et-vient des caravanes et des bateaux, avec le mouvement de voyageurs et, comme on dit en anglais, de « commodités » dont leur incessante navette s'accompagne, qui en définitive a jadis tissé et tisse encore aujourd'hui les liens les plus serrés et les plus prégnants entre l'Est et l'Ouest du Vieux monde. Tout cela vaudrait bien un chapitre, sans doute : mais par bonne chance il se trouve que ce chapitre a déjà été écrit, et en grand détail, pour la période qui nous intéresse. Nous n'avons pas, en effet, à revenir sur les plus anciennes traces de rapports maritimes entre la côte occidentale de la péninsule et Babylone (Bâvêru), ni sur les expéditions de Skylax ou de Néarque. Mais nous avons toutes raisons de croire que les conquêtes indiennes des Indo-Grecs ont stimulé les relations des « ports ouverts » (emporia) de la péninsule avec Séleucie du Tigre, Antioche de l'Oronte et Alexandrie d'Égypte. A partir de notre ère, les documents se multiplient en même temps que croît le volume des marchandises transportées : aussi a-t-on pu écrire des livres entiers sur le commerce de l'Inde avec l'empire romain ainsi qu'avec la Chine des Han (z4). Nous ne voyons pas l'intérêt qu'il y aurait à ressasser une fois de plus, si instructifs qu'ils soient, les textes de Tacite ou de Strabon, de Pline l'Ancien ou de Ptolémée, ni même ceux qui restent encore à glaner — tel ce passage que nous ne nous souvenons pas d'avoir déjà vu cité, où Ammien Marcellin (XIV, III, 3) nous apprend qu'à la grande foire qui se tenait chaque année en septembre à Batnè, entre Edesse et l'Euphrate, des marchandises étaient apportées de l'Inde et de la Chine (quœ Indi mittunt et Seres). Comme, à notre grand regret, les circonstances ne nous ont pas permis de naviguer sur les boutres de l'Océan Indien, ni de suivre de bout en bout, depuis Palmyre jusqu'à Bactres et de Bactres jusqu'à l'Issedôn Sérique, la fameuse route de la soie, nous n'avons aucune donnée d'expérience personnelle à ajouter aux commentaires dont ces citations ont fait si souvent l'objet. Toutefois, l'occasion nous a été fournie de vérifier expérimentalement l'étendue et la longue durée de ce mouvement d'échanges. L'Émîr Habîb-Ullâh était curieux de vieilles monnaies, et beaucoup de celles qui sortent journellement du sol afghan avaient afflué entre ses mains : car les fonctionnaires en visite à la capitale les lui apportaient d'autant plus volontiers en guise de nazar que ce cadeau, sûr d'être bien reçu, ne leur coûtait rien que la peine de le confisquer à son inventeur. La collection était entassée pêle-mêle dans une malle qui avait été transportée au pavillon de Bâgh-Bâlâ, où l'on songeait à établir le futur musée de Kâbul. Nous proposâmes au conservateur d'alors de classer les pièces les plus rares et les mieux conservées pour qu'il pût les exposer en vitrines, et il ne se fit pas prier pour accepter. C'est ainsi que sur la longue table où se faisait le triage nous vîmes s'aligner docilement dans le lot des monnaies étrangères au pays, à côté de l'amoncellement des drachmes indo-grecques et surtout indo-scythes, d'abord quelques dariques, puis (parallèlement aux pièces arsacides et sassanides) des deniers des douze Césars et de leurs successeurs, tant de Rome que de Byzance, et, enfin, pour clore la série,