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0169 La Vieille Route de l'Inde de Bactres à Taxila : vol.2
La Vieille Route de l'Inde de Bactres à Taxila : vol.2 / Page 169 (Color Image)

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doi: 10.20676/00000237
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LES FACTEURS ARTISTIQUES

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dans la vallée du Gange au cours du He siècle avant notre ère. Or, cet art, nous le connaissons, avec les emblèmes algébriques et les schémas symboliques, visiblement dérivés des mémentos des grands pèlerinages, par lesquels il croyait représenter les grands miracles du Buddha. Tel est l'aveugle respect de la tradition, professé par les Indiens, religieux ou laïques, que ce ne fut pas une petite affaire d'en modifier de fond en comble le répertoire. Combien de lustres ou plutôt de décades aurait pris en temps normal cette modification ? Nous n'avons plus à nous le demander. Entre 75 et 70 avant notre ère, les Scythes ont passé là; et une génération plus tard, quand sous ceux de leurs satrapes dont les inscriptions nous attestent la conversion, se pose la question de la réfection des sanctuaires détruits et dévalisés dans la première fureur de la conquête, c'est alors que s'offre la chance de succès, et de diffusion dans le succès, pour les formules nouvelles qui avaient été déjà élaborées quelque cinquante ans plus tôt. La crise brutale de l'invasion a brisé le joug de la routine; la population déjà si mélangée du Gandhâra s'est accrue de nombre d'immigrants barbares et ceux-ci viennent grossir à l'exemple de leurs chefs, ainsi qu'on peut voir par les fréquentes images de donateurs vêtus du costume nordique, les rangs des fidèles laïques groupés autour de la Communauté, restaurée elle aussi dans son prestige. Que ces nouveaux u5asaka, que n'arrête aucun scrupule héréditaire, adoptent sans hésiter l'interprétation perfectionnée qui leur est offerte de la légende du Maître, le Maître inclus, qui pourrait s'en étonner ? Faut-il le répéter une fois de plus ? L'école nouvelle répondait exactement au même besoin d'édification que l'ancienne ; mais grâce à l'image du Buddha, elle y répondait beaucoup mieux, en illustrant clairement et sans réticences la lettre des textes. Assurément elle était moins indienne, en ce sens qu'elle n'était plus ligotée par les préjugés et les habitudes de la péninsule, mais elle n'en était que plus explicitement bouddhique.

C'est toujours là qu'il faut en venir. Il était nécessaire de justifier le caractère composite du répertoire ornemental de l'école gréco-bouddhique avec son mélange de motifs iraniens, indiens et classiques : mais elle ne peut être considérée comme vraiment constituée que du moment où elle dispose, aussi bien pour la composition des bas-reliefs des stûpa que pour les idoles des vihâra, de la figure du Buddha Çâkya-muni. Sur l'époque de l'apparition de cette dernière nous restons réduits à des tâtonnements incertains; car, dans ces temps obscurs, comment marcher autrement qu'à l'aveuglette ? Toutefois, la marge possible d'erreur va se rétrécissant de plus en plus. Naguère les hypothèses flottaient de Ménandre à Kanishka sur un intervalle de plus de deux cents ans. Nous savons à présent de façon certaine que des idoles du Buddha étaient érigées et adorées au Ier siècle après notre ère, et cela seul implique que la création du modèle original était sensiblement antérieure à celle-ci. Comme, d'autre part, on ne peut faire remonter ce coup de maître avant les derniers Indo-Grecs, nos divagations chronologiques n'ont plus d'autre champ que le Ier siècle avant J.-C. Tout récemment, l'éminent helléniste que nous venons déjà de citer et qui a bien voulu apporter à nos premières conclusions chronologiques l'appui d'une adhésion fondée sur sa connaissance sans rivale du facteur grec en Orient, a cru couper court à toutes les incertitudes et combler l'attente générale en reconnaissant le Buddha assis à l'indienne sur une monnaie de Mauès. Nous donnerions beaucoup pour en être aussi sûrs que lui : mais les pages ingénieuses que M. W. W. Tarn consacre à la démonstration de son identification prouvent assez que celle-ci n'est pas de celles qui s'imposent : l'évidence ne se plaide pas. Que dès ce moment la figuration plastique du Sauveur indien eût été réalisée, c'est ce que tout ce qui précède nous invite à croire; mais que sa figure fût déjà à ce point popularisée qu'elle pût fournir d'emblée un type monétaire à un conquérant étranger, il faudrait pour le démontrer un témoignage incontestable, ce qui n'est pas le cas. Une autre observation à laquelle on ne semble pas avoir accordé jusqu'ici l'attention qu'elle mérite nous