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0122 La Vieille Route de l'Inde de Bactres à Taxila : vol.2
La Vieille Route de l'Inde de Bactres à Taxila : vol.2 / Page 122 (Color Image)

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doi: 10.20676/00000237
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288   LES PROPAGANDES RELIGIEUSES

ci-dessus (p. 274), à savoir que l'adhésion à la Bonne-Loi n'impliquait de la part de l'upâsaka aucune apostasie et qu'il n'y avait à cette religion en partie double aucun empêchement théorique ni même pratique, si l'on en juge par la façon dont de nos jours shintoïsme et bouddhisme vivent côte à côte au Japon. Il est vrai; mais en fait les difficultés ne tardaient pas à naître du moment que la secte rivale avait, elle aussi, des desservants attitrés (en l'espèce les Pâçupatas), qui fort naturellement disputaient à la Communauté bouddhique les libéralités de leur commun zélateur; et il était parfois moins facile pour ce dernier de partager sa bourse que son cœur. Le meilleur moyen de couper court à ces tiraillements et de donner tout apaisement aux scrupules des fidèles laïques était évidemment de leur fournir, en même temps que des doctrines eschatologiques et des préceptes de morale, une divinité protectrice créée à leur usage particulier, mais sur le modèle même de leur ishta-dêvatâ ancestrale (4). En définitive ce n'était là qu'une application de cette « politique des aumônes » que les nécessités de la concurrence vitale avaient contraint les sectes mendiantes à élaborer et dont les récits des textes reflètent à chaque pas les combinaisons souvent plus ingénieuses qu'édifiantes.

Des considérations de ce genre n'ont pas été étrangères au parti que prit bientôt la Communauté bouddhique de se fabriquer, en marge des dieux locaux dont elle ne contestait pas l'existence, un panthéon qui ne fût qu'à elle et l'accompagnât partout où elle pénétrait. Mais ne crée pas un panthéon qui veut : elle ne put faire autrement que d'employer à cet effet les deux seuls types d'êtres surnaturels dont elle disposât en toute propriété, à savoir les Buddhas et les Bodhisattvas, sauf à les transfigurer, à les multiplier et à les projeter en tout sens dans les infinis du temps et de l'espace : éblouissant feu d'artifice dont l'extravagante prodigalité dissimule mal la pauvreté des moyens utilisés pour l'obtenir. Encore n'est-il pas sûr que toute cette mythologie fût aussi originale qu'on le souhaitait et ne dût effectivement rien à personne. Parmi les Bodhisattvas, à commencer par Avalokitêçvara et à continuer par Vajrapâni et Maiijuçrî, plus d'un n'est que le travestissement bouddhique d'une divinité populaire, et c'était d'ailleurs là le meilleur gage de leur succès (5). Quant aux Buddhas purement spéculatifs ou métaphysiques (Dhyâni-Buddha), entités supra-sensibles dont l'essence éthérée renchérit sur la nature réputée à présent trop grossière des sept Buddhas humains (Mânushi-Buddha), mais qui, selon la mode nouvelle, ne sont plus qu'au nombre de cinq, ils rappellent aussitôt avec leurs noms parlants les grandes figures allégoriques en qui le Zoroastrisme se plaisait à personnifier les puissances du Bien. Le premier dont l'existence nous soit attestée dès le ne siècle par la date de la première traduction chinoise du Sukhâvatî-vyaha, et qui continue à être au Japon l'objet de la dévotion d'une secte piétiste, n'a même pris aucun soin de nous déguiser ses origines. Son vocable est Amitâbha, « Lumière-infinie »; la région où il siège avec ses élus est l'Occident ; pour désigner le bienheureux séjour vers lequel il guide et où il accueille les âmes de ses fidèles — reprenant ainsi à son compte le rôle du Mithra des mystères — nous ne pouvons mieux faire en français que d'employer un mot d'origine persane, celui de « paradis »; et pour couronner le tout, c'est un prince parthe qui se chargea de propager son culte jusqu'en Chine. Les autres figures de son groupe ont un relief et un rôle plus effacés; mais avec les cinq localisations, les cinq couleurs, les cinq éléments, les cinq sens qui leur correspondent, tous reflètent de près les spéculations alors en vogue sur les anciens Amesha-spentas de l'Avesta, devenus les cinq Amahrâspans ou Amshaspands. Bien entendu, de chacun d'entre eux émane, en qualité de fils spirituel, un Dhyâni-Bodhisattva; et quand enfin (dès le Ive siècle à ce qu'il semble), pour compléter cette constellation d'esprits lumineux, les cinq Dhyâni-Buddhas eux-mêmes seront censés n'être que les émanations, les hypostases d'un Âdi-Buddha ou Buddha primordial, bien subtil et remarquablement informé sera celui. qui, quelque jour, mesurera selon