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0195 La Vieille Route de l'Inde de Bactres à Taxila : vol.2
La Vieille Route de l'Inde de Bactres à Taxila : vol.2 / Page 195 (Color Image)

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doi: 10.20676/00000237
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LA REGION INDO-IRANIENNE   361

à l'Inde par sa quasi-unification sous le sceptre des Mauryas, en reprenant aux Séleucides les conquêtes orientales des Achéménides, amena en contact les deux religions sur les confins indoiraniens. Nous avons été en droit de nous demander si un esprit de revanche contre l'insolente domination des adorateurs de l'Asura suprême n'avait pas favorisé le succès du bouddhisme parmi ces « Gandhâras, Kambôjas et Yavanas » enfin libérés du joug des fonctionnaires perses (supra, p. 267). La récupération par la péninsule de ses limites naturelles dura trop peu de temps pour que nous puissions lui attribuer une grande importance politique : nous ne saurions, au contraire, trop insister sur les durables effets qu'elle devait produire dans le domaine religieux. La semence alors jetée par Açoka portera ses fruits pendant tout un millénaire et ne sera finalement étouffée que par le fanatisme musulman.

L'intermède indo-grec (11e siècle). — Pendant ce temps la Bactriane continuait à remplir, au Nord de la région indo-iranienne, le rôle qui dans la péninsule balkanique était dévolu à la Macédoine par rapport à la Grèce, celui d'état-tampon chargé de protéger la civilisation des sédentaires contre l'irruption des nomades de la steppè. Cette fonction supposait, aussi bien à l'époque des Diadoques qu'à celle des Achéménides, l'entretien par la riche et commerçante province d'une force militaire capable de tenir les Scythes en respect. Ainsi s'explique l'apparente contradiction des témoignages qui tantôt nous dépeignent la Bactriane comme peuplée de paysans et de marchands pacifistes à tout prix, et tantôt comme aussi martiale que turbulente : et, de fait, les incessantes rébellions de cette satrapie durent être autant de pronunciamentos militaires. Du même coup l'on comprend comment la tentation devint irrésistible pour les capitaines et routiers Yavanas, ses nouveaux maîtres, non seulement de se déclarer à leur tour indépendants, mais encore de profiter de la dissolution simultanée des deux empires séleucide et maurya pour se payer aux dépens des contrées auxquelles ils servaient de couverture. Le royaume qu'ils se taillèrent finalement entre l'Irân des Arsacides et l'Inde des Çuineas comprenait (et un moment débordait même à l'Est) les provinces orientales de Darius Ier et d'Alexandre; du même coup, remarquez-le, il unifiait pour la première fois dans l'histoire la région indo-iranienne, son boulevard bactrien compris. Malheureusement pour l'hellénisme et aussi (ne craignons pas de le dire) pour l'avénir du Moyen-Orient, le nouvel état ainsi créé ne devait pas tarder à périr -du fait de ses querelles intestines. Du jour où Eukratidès lui a ravi ses provinces iraniennes, Dèmètrios, fils d'Euthydème, n'est plus que « roi des Indiens »; et les Scytho-Parthes ne tarderont pas à mettre d'accord leurs maisons rivales en les éteignant l'une après l'autre. Ce qui paraît surtout digne d'être retenu de cette geste avortée, c'est d'abord que, par tolérance naturelle, par intérêt politique, parfois même par adhésion au moins mentale (et comment ne pas évoquer à nouveau la grande figure de Ménandre ?), les Indo-Grecs et leurs fonctionnaires ont continué à faire bénéficier leurs sujets bouddhistes — apparemment devenus la majorité — du régime de faveur dont ceux-ci avaient joui sous les derniers Mauryas; c'est ensuite que, si préoccupés qu'ils fussent de leurs intérêts personnels et bien qu'ils ne semblent avoir officiellement patronné que la gravure en médaille, ils ont par la force des choses propagé dans leur colonie quelques-unes des formes de cette culture hellénistique qui avait déjà envahi derrière eux toute l'Asie antérieure. S'il n'y a aucun fond à faire sur les souvenirs rapportés d'Europe par les rares archers indiens rescapés des guerres médiques, et si Alexandre lui-même n'a pu être dans l'Inde que le fourrier d'un retour offensif de l'iranisme, les cent cinquante ans qui s'étaient écoulés depuis son raid avaient permis à la politique d'assimilation qu'il avait inaugurée, et que les Séleucides avaient poursuivie, de produire ses premiers effets. C'est bien à présent de l'hellénisme dont ils n'étaient pas les enfants perdus, mais simplement les sentinelles avancées, que rois, stratèges et méridarques Yavanas sont les avant-courriers;

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