National Institute of Informatics - Digital Silk Road Project
Digital Archive of Toyo Bunko Rare Books

> > > >
Color New!IIIF Color HighRes Gray HighRes PDF   Japanese English
0199 La Vieille Route de l'Inde de Bactres à Taxila : vol.2
La Vieille Route de l'Inde de Bactres à Taxila : vol.2 / Page 199 (Color Image)

New!Citation Information

doi: 10.20676/00000237
Citation Format: Chicago | APA | Harvard | IEEE

OCR Text

 

LA RÉGION INDO-IRANIENNE

Svât le pèlerin et dont Sir Aurel Stein a publié la photographie ? Et enfin, devant ce faisceau spontanément formé de concordances, comment ne pas comprendre que par « Pîlu-sâr n les informateurs de Hivan-tsang entendaient « Tête d'éléphant » (on dirait aujourd'hui Pîl-sâr ou Sâr-é-pul), et que, par conséquent, ils parlaient un dialecte iranien ? De même, il nous paraît impossible de ne pas reconnaître sous la transcription chinoise b'i-tu appliquée aux « saules » du bois voisin de la même colline, non (comme le veut Stanislas Julien) le sanskrit vitra = rotin, lequel d'ailleurs ne pousse pas au Kapiça, mais bien le futur persan bîd, qui a justement le sens requis. Enfin, il n'est pas davantage douteux que dans l'appellation de la ville de Si-p'i-to-fala-sseu, les deux premières syllabes, qui représentent l'épithète, ne soient plus proches d'une forme iranienne (cf. pehlvi spêt) que du sanskrit çvêta (5). Jusque dans la région de Jelâlâbâd, encore plus voisine de l'Inde, nous croyons saisir une autre trace du même processus linguistique : le témoignage de Ptolémée et de Stéphane de Byzance sur l'équivalence des noms de Nagara (hâra) et de Dionysopolis ne peut s'expliquer que par une étymologie populaire semi-persane transposée en grec, « Nagar-é-Hara, la ville de Çiva-Dionysos » (cf. supra, p. 26o).

Ce sont là, dira-t-on peut-être, de bien faibles indices..I1 est vrai ; mais un autre renseignement donné en passant par Hivan-tsang prouve beaucoup plus, à savoir que dès le vue siècle le Kapiça était iranisé non seulement dans son langage, mais encore dans ses moeurs. Par deux fois la même phrase revient dans le Si-yu hi pour caractériser les peuples qui ne respectent pas, à l'occasion des unions conjugales, les prohibitions de proche parenté, et chez qui « les mariages ne sont qu'un honteux mélange des sexes ». La première fois, c'est au livre I à propos du Kapiça, la seconde au livre XI, à propos de la Perse (6). L'occasion de ce double accès de vertueuse indignation donne assez clairement à entendre que la coutume iranienne des unions incestueuses à nos yeux comme aux siens et à ceux des Indiens, s'était dès lors répandue de la Perse au Kapiça. L'introduction simultanée, reflétée par les fresques de Dokhtar-é-Naushirvân et de Bâmyân, des modes vestimentaires, des coiffures et des parures sassanides recouvrait donc une transformation déjà profonde des us et coutumes du Kôhistân. C'était l'aboutissement d'un travail d'assimilation commencé de longue date. Nous avons constaté ci-dessus (p. 204) que, dès le temps d'Alexandre, l'ancienne satrapie d'Outre-monts s'était rétrécie au point de s'arrêter au Lampaka : inversement cela veut dire que le Kapiça, tout comme l'Arachôsie, faisait jusqu'à lui partie intégrante de l'empire achéménide et n'avait encore connu aucune éclipse de l'influence perse. Il en allait tout autrement de la vallée inférieure de la Kubhâ, dès lors redevenue indépendante, et où les langues, croyances et pratiques indiennes devaient subsister bien des siècles après le passage de Hivan-tsang et ne purent même pas être du premier coup exterminées par Mahmûd de Ghaznî. Le contraste que du point de vue de la géographie physique nous avons dû signaler dès le début de notre étude (p. 3o) entre le Haut et le Bas pays se doublait jadis, comme on voit, de différences culturelles. Sur ces flux et reflux un fait surnage . c'est dans un Kôhistân déjà fortement iranisé qu'ont pénétré les premières incursions arabes en diret..tion de Kâbul; et finalement c'est en persan — un persan quelque peu mâtiné de turc et d'afghan et bientôt mué en.ûrdû — que les armées de partisans et de mercenaires rassemblées par l'amour du pillage sous la bannière de l'Islam ont finalement conquis le Paiijâb et l'Inde gangétique.

LES ENSEIGNEMENTS DE LA GÉOGRAPHIE POLITIQUE. - Ces dernières constatations permettent déjà d'entrevoir à quel point l'histoire ancienne de la région que nous étudions détermine à l'avance le cours de ses destinées ultérieures. Dès le vile siècle, elle commence à prendre la physionomie que, dans ses grands traits, elle gardera jusqu'à nos jours. Que, rattachée tantôt à la Perse

365