国立情報学研究所 - ディジタル・シルクロード・プロジェクト
『東洋文庫所蔵』貴重書デジタルアーカイブ

> > > >
カラー New!IIIFカラー高解像度 白黒高解像度 PDF   日本語 English
0084 La Vieille Route de l'Inde de Bactres à Taxila : vol.1
インドからバクトリアのタキシラに到る古道 : vol.1
La Vieille Route de l'Inde de Bactres à Taxila : vol.1 / 84 ページ(カラー画像)

New!引用情報

doi: 10.20676/00000237
引用形式選択: Chicago | APA | Harvard | IEEE

OCR読み取り結果

 

74   L'ARCHÉOLOGIE DE LA ROUTE

tout bonnement à « seconder » le verdict prononcé par Alexander Burnes au bout de ses trois jours de halte, et à douter avec lui que Balkh ait jamais été « a substantial city ». Du moins telle est l'opinion que l'aspect actuel de ses restes finit par imposer au sujet de son passé : « Ses ruines s'étendent sur un circuit d'environ vingt milles (dit encore Burnes, non sans exagérer quelque peu), mais elles ne présentent aucun symptôme de magnificence (7). » Il n'a que trop raison : si tout y est grand, rien n'y est grandiose; ce n'est pas la quantité qui manque, c'est la qualité. Mais si cette impression est juste, comment comprendre que tant de personnes en Europe aient pu se forger à distance une idée si différente de la réalité et concevoir une opinion si haute de ce qu'aurait dû être à leur gré l'architecture solide et luxueusement décorée de l'antique cité ? A la vérité, du côté d'où elles regardaient, elles ne devinaient ce Bactres mystérieux qu'à travers leurs souvenirs classiques et ne pouvaient faire autrement que de projeter sur l'écran de leur imagination, à la place de son image absente, des traits inconsciemment empruntés à toutes les ruines intermédiaires, à Baalbeck et à Palmyre, à Ctésiphon et à Suze, à Pasargades et à Persépolis. Une pareille superposition de terrasses et de propylées, d'arches et de frontons, de colonnes et d'architraves finissait automatiquement par créer un tableau aussi fastueux à lui seul que tous les autres ensemble. Ce phénomène d'optique mentale pourrait nous éclairer sur la manière dont s'est tissé le voile de nos illusions, après quoi nous aurions tôt fait de conclure à un cas d'auto-suggestion et même de suggestion collective; mais, je vous l'avoue, cette tentative d'explication ne me satisfait pas entièrement. Pour que le mirage bactrien, si mirage il y a, ait pu éblouir tant de bons esprits (j'en juge par l'attirance qu'exerçaient sur eux ses prestiges), il fallait qu'ils eussent de sérieuses raisons de s'y laisser prendre. Ne serait-il pas intéressant et, qui mieux est, utile à nos recherches, d'essayer de démêler l'intime mélange de vérité et de fiction dont est née cette sorte de transfiguration archéologique de Bactres ? Et, d'autre part, ne croyez-vous pas que cette mise au point serait bien nécessaire pour notre public ? Car parmi les patrons parisiens de notre entreprise, combien ont su, à votre exemple, garder leur sang-froid critique et se souvenir, comme vous me l'écriviez dans votre dernière lettre, que « quand on cherche, on n'est jamais sûr de trouver » ? C'est là à quoi je songe dans notre gîte de fortune, cependant qu'au dehors la pluie fait rage, assis à une table branlante entre un Hivan-tsang et un Arrien — qui, avec l'Ariana antiqua, constituent le plus clair de notre bibliothèque. Qui, sinon vous, prendrai-je comme confident de mes pensées, et près de qui trouveront-elles plus amical accueil et jugement plus sûr ?

J'ignore encore combien de points aura au juste mon homélie; mais, pour commencer, j'en vois au moins .deux que personne ne pourra jamais contester à Balkh : c'est à savoir l'excellence de sa situation géographique et l'inépuisable fécondité de son sol. A la vérité, la première a beaucoup perdu de sa valeur depuis que le commerce de l'Inde et de la Chine avec l'Occident se fait surtout par mer; mais la seconde est toujours entretenue dans une bonne part de la plaine bactrienne par les nombreux canaux d'irrigation dérivés des rivières permanentes qui descendent des neiges éternelles de l'Hindûkush (8). Cela, vous le savez aussi bien que moi ; mais je le vois à présent de plus près que vous, et si clairement que je ne puis m'empêcher de vous le redire. Aussi bien ne suis-je pas fâché d'insister sur le fait qu'en tout état de cause les partisans de l'antique prospérité de Balkh ont indéniablement raison. Mais sur ces prémisses indubitables n'a-t-on pas édifié des conclusions plus que hasardeuses ? Là est la question, et je crains bien que (comme on dit en style parlementaire anglais) la réponse ne soit « in the affirmative ». Une citation rencontrée dans l'Ariana antiqua (p. 163) peut nous aider par son outrance romantique à déceler le spécieux sophisme qui, petit à petit, s'installait dans nos livres d'histoire ancienne. Je traduis,