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『東洋文庫所蔵』貴重書デジタルアーカイブ

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0124 La Vieille Route de l'Inde de Bactres à Taxila : vol.1
インドからバクトリアのタキシラに到る古道 : vol.1
La Vieille Route de l'Inde de Bactres à Taxila : vol.1 / 124 ページ(カラー画像)

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doi: 10.20676/00000237
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114   L'ARCHÉOLOGIE DE LA ROUTE

de Bactres, plus que jamais il me paraîtrait temps — ne serait-ce que pour ménager les transitions et épargner une déception trop forte aux âmes mal aguerries contre les déboires archéologiques — de mettre une sourdine aux espérances exagérées qu'elle aurait fait concevoir.

J'ignore (ici, l'on ignore toujours tout) quelle impression ces considérations ont pu produire sur la Commission, si tant est qu'elles en aient produit une; mais, permettez-moi de l'ajouter tout aussitôt, je serais fâché que mon effort de vision exacte et sincère l'eût conduite à tirer des conséquences devant lesquelles une sorte d'instinct m'a toujours fait reculer. Certes, j'ai dû déclarer qu'il serait tout à fait excessif de s'attendre à retrouver, sous les tertres argileux de Balkh, des monuments achéménides, grecs ou sassanides de premier ordre, et encore moins des témoins d'on ne sait quelle civilisation bactrienne originale; mais je n'ai jamais conclu que, pour ingrate et laborieuse que fût la tâche, il fallût l'abandonner. Mon impression très nette est que, sur ces confins de l'Asie centrale, dans une contrée très superficiellement colonisée et recouverte à nouveau par le flot de la barbarie — ou, si vous voulez, de la semi-barbarie — dès la fin du He siècle avant notre ère, l'ambiance locale n'a jamais été favorable à l'éclosion de ce succédané de Persépolis ou de Ctésiphon, de Palmyre ou d'Antioche qu'apparemment on attendait; mais au moment même où je vous bombardais de ces réflexions mélancoliques et que je vous expliquais si copieusement pourquoi nos fouilles restaient muettes, je persistais à attendre comme au premier jour qu'elles se décidassent enfin à parler. Elles ne nous rendront, c'est entendu, ni les palais du Takht-é-Jamshid ni les temples de Baalbeck ou de Palmyre ; mais qui oserait soutenir qu'on ne doive fouiller qu'à ce prix ? Qu'il ne faille renvoyer de mission à Balkh que munie de tout l'argent et de tout le personnel nécessaire, j'abonderais dans votre sens ; mais n'essayez pas de me faire dire, même après deux saisons aussi peu rémunératrices, que nous sommes en droit d'interrompre, pour de bon, les travaux.

Loin de moi la prétention de dicter à mes successeurs le plan de leurs futures recherches ! Toutefois, je crois pouvoir vous dire ce que nous aurions souhaité faire, si ce climat ne nous avait si rapidement mis hors de combat. Nous aurions voulu d'abord achever la prospection de l'Arg; mais profitant de l'expérience acquise et tirant parti de l'extrême dureté du terrain, nous aurions essayé de la mener plus rapidement au moyen de puits et de tunnels de sondage. Surtout nous rêvions d'explorer à leur tour à tout le moins le tertre central du Bâlâ-Hisâr et le Teppeh-Zargarân — sans oublier le Nâdir-Teppeh, dont, entre temps, le véritable caractère aurait été rapidement vérifié; car, vous le savez, il n'y a pas que l'Arg à Balkh; et enfin, si tour à tour stûpa bouddhique, Tertre des orfèvres et ville royale ne nous avaient donné que des résultats négatifs, eh bien, sans nous décourager, nous nous serions souvenus qu'il n'y a pas que Balkh en Bactriane... Il faut que vous en conveniez avec moi : si le métier de prospecteur à de nombreux avantages, il a aussi ses inconvénients. C'est assurément une rare chance pour un archéologue que de voir s'ouvrir devant soi un pays quasiment inexploré du point de vue qui l'intéresse; mais ne croyez pas que pour autant il reste libre de s'y mouvoir à sa guise. Chacun sait d'avance ce qu'il est moralement obligé de faire. Le premier qui pénètre en Afghânistân doit bon gré mal gré (la Commission nous l'a fait bien voir) se rendre au plus tôt en Bactriane ; celui qui entre en Bactriane doit, volens nolens, aller à Balkh; celui qui va à Balkh doit fatalement commencer ses recherches par l'Arg : cela est écrit d'avance sur le livre des destins à la page tenue à jour par la plus tyrannique de toutes les opinions, celle qui s'appelle « l'opinion savante ». Je vous l'ai déjà dit, j'ai fait ce que tout autre aurait fait à ma place, car il ne lui aurait pas été loisible de faire autre chose : il aurait seulement pu le faire mieux. Devant la tâche restée si malencontreusement interrompue, votre amitié consentira-t-elle à accueillir une confidence de plus ? Entre nous,