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『東洋文庫所蔵』貴重書デジタルアーカイブ

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0086 La Vieille Route de l'Inde de Bactres à Taxila : vol.1
インドからバクトリアのタキシラに到る古道 : vol.1
La Vieille Route de l'Inde de Bactres à Taxila : vol.1 / 86 ページ(カラー画像)

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doi: 10.20676/00000237
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L'ARCHÉOLOGIE DE LA ROUTE

rendre compte autrement de ce singulier mélange de déserts arides et de terres plantureuses, de chaleurs torrides et de froids rigoureux, de vie sédentaire et de nomadisme, de types et de parlers indo-européens et mongoloïdes, de barbarie primitive et de vieille civilisation ? I1 n'en faut pas douter : si cette bordure septentrionale du plateau iranien ne fait pas proprement partie de ce qu'on appelait la région « touranienne », elle se trouve à tout le moins sur ses confins immédiats et participe déjà à ses caractères essentiels, aussi bien ethnographiques que physiques. Or il n'y a, à ma connaissance, aucune raison de penser qu'il en était jadis autrement et que la Bactriane ait jamais joui, en tant que contrée et que nation, d'une unité et d'une personnalité foncièrement distinctes du reste du bassin de l'Oxus. Sans doute, comme je viens de vous le répéter, sa situation est magnifique : mais il est non moins évident, à première vue, que ce pays, bâillant vers l'Ouest comme un entonnoir, est avant tout une terre de transition et un grand lieu de passage : les contours arrêtés et fermés, propres à la naissance d'une individualité ethnique et d'une civilisation nationale, je ne les aperçois pas ici.

Ramenons cependant nos yeux qui toujours involontairement se portent du côté des grands espaces ouverts là-bas, vers la steppe jadis scythique, à présent turcomane, et regardons plus près de nous. Sur la large et épaisse bande de loess qui s'étend entre les derniers contreforts de l'Hindûkush et les sables qu'une pointe avancée du désert pousse entre les cultures et la rive gauche de l'Oxus, de toutes parts nous voyons surgir les croupes arrondies des teppeh. A partir de Tâsh-Qurghân, ils se font de plus en plus nombreux à mesure que l'on avance vers Balkh et que la plaine devient mieux arrosée et par conséquent plus fertile. Criblés des tessons de poteries qui sont le signe certain d'une longue colonisation humaine, ces vastes monticules de terre marquent le site des « mille villes de l'opulentissime Bactriane », pour reprendre la phrase souvent citée de Justin. Ne saurions-nous rien de l'histoire du pays, que leur aspect et leur répartition nous renseigneraient déjà sur les conditions anciennes de sa vie. C'est seulement dans les contrées peu sûres, constamment exposées aux incursions des Nomades ou au passage des invasions, que toute la population rentre le soir avec ses troupeaux dans l'enceinte fortifiée des villages, pour s'égailler de nouveau au matin dans les champs. Or tel était évidemment le système qui prévalait ici, comme d'ailleurs (ainsi que nous avons pu le constater) sur toute la bordure Nord-Est de l'Irân : ce qui n'est nullement pour surprendre dans le cas d'un pays frontière. Mais la séculaire insécurité des personnes et des biens dont il témoigne n'est pas, il faut l'avouer, une condition favorable au développement littéraire et artistique d'un grand peuple (9).

Une autre impression dont on ne peut davantage se défendre, c'est que ces prétendues « mille villes » de Justin n'étaient au fond que des bourgades rurales. Leur population devait être déjà pour une moitié nomade et pastorale; quant à la moitié sédentaire, mettez qu'elle était composée pour les trois quarts de laboureurs et pour le reste de boutiquiers. Il en était déjà ainsi vers 130 avant notre ère quand le voyageur chinois Tchang K'ien ne note au pays de Ta-hia que des paysans ou des marchands et il en est encore de même à l'heure présente. Originairement, le bourg de Bactres, promis à tant de renommée, ne fut sans doute qu'un asile permanent pour les propriétaires des champs voisins, un rendez-vous d'hiver pour les pasteurs nomades, un bâzâr à l'usage des uns et des autres, et enfin un temple de la grande déesse scythique Anahid ou Anaïtis. Son heureuse situation fit le reste. De nos jours encore, quand approche l'équinoxe de printemps et que la fin des neiges et des pluies rend aux gens du pays leur liberté de mouvement, on voit de toutes parts un flot de pèlerins se précipiter vers la « noble tombe » de Mazâré-Sharîf pour la fête de la « Fleur-Rouge », laquelle dure quarante jours, autant que la floraison de cette espèce de coquelicot ; et ce court laps de temps suffit, en effet, pour que les dernières rigueurs