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『東洋文庫所蔵』貴重書デジタルアーカイブ

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0122 La Vieille Route de l'Inde de Bactres à Taxila : vol.1
インドからバクトリアのタキシラに到る古道 : vol.1
La Vieille Route de l'Inde de Bactres à Taxila : vol.1 / 122 ページ(カラー画像)

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doi: 10.20676/00000237
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II2

L'ARCHÉOLOGIE DE LA ROUTE

battue remarquablement homogène d'où les briques cuites ont totalement disparu. Cette couche, traversée à la cote de 15 mètres par un dernier lit de cendres, ne contient plus, en dehors de filaments d'amiante, que des débris de belles poteries rouges et, comme pour attester jusqu'au bout l'ingénieuse malice des hommes, des pointes de flèche en bronze et des pierres de fronde, pendants des boulets de canon en pierre ou en fer et de la grenade à main que nous ont fourni les étages supérieurs. Nous sommes actuellement descendus à 18 mètres et n'avons pas encore atteint le sol vierge ; mais nous approchons du niveau de la plaine et l'infiltration des eaux nous forcera sans doute bientôt à nous arrêter...

Que conclure à présent de tout ceci ? Qu'il faut plier bagage et aller chercher fortune ailleurs, car Balkh n'a décidément rien conservé de son passé, rien du moins du passé qui nous intéresse ?... Telle est peut-être l'impression qu'a emportée d'ici notre ami J. Hackin. La jeunesse est prompte et catégorique; et bien que je me sois efforcé de n'influencer son opinion en aucune manière, il était vite devenu encore plus pessimiste que moi. N'oublions pas toutefois combien insignifiantes sont encore nos fouilles si l'on considère l'immensité du site à explorer. Volontiers nous nous comparerions, ma femme et moi, à deux fourmis que vous auriez envoyées au fond de la djangle autopsier un cadavre d'éléphant. Sans doute, elles ont diligemment parcouru ses flancs en tous sens; elles ont même assez profondément gratté l'une des bosses frontales; mais n'allez pas leur demander de déclarer qu'il faut tirer l'échelle après elles, car le monstre énorme est à peine entamé et il attend la suite des opérations. Peut-être est-ce la faute de ma province natale : je crois que l'entêtement a son prix. Vous connaissez ce conte indien où un naufragé entreprend d'épuiser la mer pour retrouver sa fortune engloutie; et il s'attelle avec une si froide détermination à cette besogne insensée que les dieux marins effrayés s'empressent de lui rapporter son trésor. La tâche de vider un à un les tertres de Balkh n'est heureusement pas une tâche impossible; mais soyez sûr que vous n'obtiendrez rien du génie de ces lieux qu'à force de persévérance et d'obstination. Vous comprenez dès lors pourquoi, à présent que l'obligeant télégramme de la Commission, arrivé par la poste à cheval, nous invite à prendre quelque repos en France après sept ans passés en Asie, mon premier mouvement ait été de me cramponner à Bactres, exactement comme il y a deux ans, quand il était question de partir pour la Bactriane, j'opinais obstinément en faveur de Kâpiçî pour l'été et de Hadda pour l'hiver. Veuillez être assez bon pour ne pas croire que ces réactions, en apparence contradictoires, manifestent simplement l'esprit contrariant que j'aurais reçu des cieux. Que votre amitié se persuade plutôt que l'ambiance où je vis me fait sentir plus vivement qu'à personne la nécessité primordiale d'avoir de l'esprit de suite dans nos desseins. C'est par là, vous ne l'ignorez pas, que l'Européen peut le mieux imposer en pays oriental une certaine sorte de supériorité, la moins contestable de toutes celles qu'il s'arroge, celle de ses méthodes. J'ai craint, j'en conviens, en 1923, qu'en quittant le versant Sud de l'Hindûkush pour le versant Nord et en abandonnant les sites déjà repérés pour faire un nouveau saut dans l'inconnu, nous ne lâchions la proie pour l'ombre [cf. infra, p. 154] et j'ai prié pour que le calice de Balkh s'éloignât de nous; mais à présent, qu'il nous a fallu boire à cette coupe dont l'amertume ne nous a pas étonnés, vous concevez que nous voulions du moins savoir ce qu'il y a au fond, puisqu'en l'absence de trouvailles, la joie de savoir est le seul genre de compensation que nous puissions espérer. Aussi au moment où vous nous offrez un congé que le délabrement croissant de nos santés ne nous laisse pas d'autre alternative que d'accepter avec reconnaissance, je ne crois pas pouvoir mieux vous remercier qu'en vous conjurant de ne pas tarder à nous donner ici un successeur qui continue l'oeuvre commencée : et c'est bien cordialement que nous lui souhaitons meilleure chance qu'à nous.