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0171 La Vie du Bouddha : vol.1
La Vie du Bouddha : vol.1 / Page 171 (Color Image)

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doi: 10.20676/00000286
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L'ILLUMINATION   169

au milieu de leur carrière, êtres et choses nous échappent de nouveau dans leur fin : à quoi servirait de s'en plaindre ? » Ainsi parle la Bhagavad-Gîta, en écho aux textes bouddhiques ; et en effet dans un monde incréé par définition, et qui ne subsiste qu'en se reproduisant sans cesse, toute tentative pour découvrir « la limite antérieure ou postérieure » de n'importe quel phénomène est d'avance vouée à l'échec. Autant vaudrait, dit de son côté le Milinda paitha, essayer de déterminer qui a pris originairement l'initiative, de la plante ou de la graine, de la poule ou de l'oeuf ; autant chercher le point où commence la ligne continue d'un cercle. Le Prédestiné n'écarte pas seulement ces spéculations comme oiseuses, il les réprouve comme pernicieuses et faisant obstacle à la seule affaire urgente de l'homme, à savoir sa « libération ». Rien de moins ambigu sur ce point que la parabole par laquelle il calme les prurits métaphysiques du Fils-de-Mâlounkyâ, aussi dangereux pour son salut que pourraient l'être des évocations libidineuses. Après l'avoir forcé à avouer qu'il ne lui a jamais promis aucune révélation sur les points visés par son interrogatoire, il lui fait comprendre ce que ce dernier a de déplacé. Entré en religion pour se guérir du mal de l'existence, il se conduit comme un homme blessé d'une flèche empoisonnée et à qui sa famille et ses amis auraient procuré un habile chirurgien, mais qui refuserait de se laisser soigner avant de savoir la caste, le nom, la taille, le teint, le domicile de son agresseur, et encore de quelle nature sont le bois de l'arc, les fibres de la corde, la hampe de la flèche, les plumes de l'empenne : il serait mort longtemps avant la fin de son enquête. Ainsi adviendrait-il du disciple qui, au lieu de courir au plus pressé, se perdrait en des préoccupations intempestives ; et c'est pourquoi, on nous le répète sans trêve, « le Bouddha n'a élucidé et enseigné que ce qui peut conduire à l'apaisement des passions, à la quiétude, à la sagesse, au Nirvâna ». Sa position est des plus nettes pour qui l'écoute. Jamais il n'a reconnu à la douleur une valeur éducative ni une vertu méritoire ; jamais il ne l'a acceptée comme une épreuve imposée par une volonté supérieure, ni ne lui a promis de bienheureuses compensations dans un monde meilleur. Il la prend comme elle vient, la tient pour le mal qu'elle est, et ne s'occupe que de trouver le moyen d'empêcher qu'elle ne revienne. Mais jamais non plus il ne s'est flatté d'en connaître la cause dernière, ni d'ailleurs celle d'aucun des éléments qui constituent notre représentation de l'univers ; jamais il ne s'est fait fort de la supprimer par grâce spéciale, au gré de sa volonté personnelle. Médecin des âmes, il n'est pas plus maître de distribuer d'office le bonheur à ses disciples que le médecin des corps de débiter par tranches la santé à ses clients. Non ; mais le premier d'entre les hommes il vient (vous l'avez lu) de découvrir la série des conditions qui engendrent et propagent inéluctablement la souffrance ; il ne lui reste plus (comme l'on va lire) qu'à tourner