National Institute of Informatics - Digital Silk Road Project
Digital Archive of Toyo Bunko Rare Books

> > > >
Color New!IIIF Color HighRes Gray HighRes PDF   Japanese English
0170 La Vie du Bouddha : vol.1
La Vie du Bouddha : vol.1 / Page 170 (Color Image)

New!Citation Information

doi: 10.20676/00000286
Citation Format: Chicago | APA | Harvard | IEEE

OCR Text

 

168   LE CYCLE DU MAGADHA ' ET DE BÉNARÉS

Que ce soit de la part du Prédestiné incompétence réelle ou abstention volontaire, force est en tout cas d'admettre les funestes conséquences de son mutisme obstiné. Les problèmes qu'il n'a pas expressément résolus sont restés par là même livrés aux discussions des théologiens, tant anciens que modernes, et ils leur ont donné tour à tour les solutions les plus contradictoires. Pour ne prendre qu'un exemple, tantôt selon les sectes bouddhiques, le Samsâra et son antithèse le Nirvâna ont été déclarés tous les deux soit réels soit irréels, et tantôt celui-ci réel ou irréel et non pas celui-là. Les exégètes européens n'ont pas manqué de reprendre à leur compte ces controverses d'autant plus passionnées qu'elles sont sans issue. Les uns ont jugé, d'accord avec les brahmanes, que le bouddhisme menait droit au plus pessimistique des nihilismes ; d'autres ont plaidé pour y retrouver bon gré mal gré des croyances qui leur étaient chères et qu'ils estimaient indispensables à la contexture de toute religion ; et pour comble certains d'entre eux n'ont pas craint d'imprimer que si le Bouddha n'avait rien répondu à ses questionneurs, c'est qu'il ne

. savait que répondre !

En présence d'une telle confusion d'opinions inconciliables, et toutes autorisées, notre embarras devrait être extrême : mais il est des grâces d'état pour les simples d'esprit, et nous sortirons sans difficulté de l'inextricable imbroglio créé par des siècles de controverses scolastiques à la seule condition d'écouter docilement la voix de la tradition ancienne. Du même coup nous dispenserons les lecteurs de bonne foi de se perdre dans l'épineux fourré des polémiques et nous ne refuserons pas aux bouddhistes les apaisements qu'ils peuvent raisonnablement espérer. A ceux-ci nous concéderons que si le Bouddha n'a pas tout su, il a du moins pu avoir et donner l'impression qu'il savait tout le nécessaire, puisqu'il a discerné à la fois ce qu'il importait de connaître et ce qu'il était indifférent d'ignorer. Avec ceux-là nous admettrons que, comme en toute circonstance, il s'est conduit sur ce point en parfait honnête homme et qu'en fait il a répondu avec autant de sincérité que de clarté. Pas d'ombre chez lui de charlatanisme. Ainsi que le lui déclare sans ambages le Fils-de-Mâlounkyâ : « Quand on ignore quelque chose, on doit l'avouer. » Tel est bien le parti qu'a pris le Bienheureux ; et, étant donnée sa coutume de se rendre à l'évidence des faits, il ne pouvait en prendre d'autre. Lui aussi a vu que la vie humaine n'est qu'une fugitive lueur entre deux noirs mystères. Rappelez-vous l'oiseau du poème nordique qui, jaillissant de la nuit, traverse à tire-d'aile la salle éclairée du festin et disparaît par la porte opposée dans les ténèbres extérieures. La comparaison indienne n'est pas moins parlante : la roue de la noria n'émerge un instant du puits que pour s'y enfoncer à nouveau, et nous ne sortons de l'invisible passé que pour être replongés dans l'imprévisible avenir : « Insaisissables dans leur commencement, perceptibles seulement