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0338 La Vie du Bouddha : vol.1
La Vie du Bouddha : vol.1 / Page 338 (Color Image)

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doi: 10.20676/00000286
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336    CONCLUSIONS

Ce n'est pas, croyons-nous, diminuer Çâkya-mouni que de le replacer ainsi dans son ambiance, ce serait le trahir que de le transposer dans la nôtre. Nul critique impartial ne saurait ménager l'éloge à sa faculté d'objectivation et au courage intellectuel qu'il lui a fallu pour se dégager de la routine mentale du troupeau humain et découvrir ce qui a paru à tant de ses contemporains et paraît encore à tant des nôtres la plus adéquate solution au douloureux problème de l'humaine destinée : mais vigueur de pensée n'est pas synonyme d'originalité et de largeur d'esprit. Il apparaît de plus en plus distinctement que la doctrine bouddhique n'est dans ses grandes lignes que le fidèle reflet des croyances populaires (nous sommes loin de dire les superstitions ) et des doctrines philosophiques qui prévalaient dans 1' Inde orientale au vie siècle avant notre ère. La tradition elle-même convient qu'elle s'est inspirée de la forme alors courante du Sânkhya et du Yoga : au premier elle a emprunté sa conception mécaniste de l'univers, au second les procédés de sa psychothérapie. Tout compte fait, l'apport philosophique de Çâkyamouni se réduit à travers les Quatre vérités et ce que nous avons cru pouvoir appeler la Cinquième, à l'énumération des douze occasions dont l'ordre invariable scande l'existence de chaque individu. Non seulement aux grandes questions concernant l'origine et la fin des choses il n'a jamais proposé de réponse, mais il n'a pas dissimulé son aversion pour ce genre de spéculations téléologiques. Dans les plus anciens textes le mot qui les désigne (drishti, littéralement « vue ») a toujours (comme doxa chez Héra-dite) le sens péjoratif de « vision erronée ». Que ses sectateurs aient eux-mêmes ressenti l'étroitesse de son système et les bornes de son enseignement, nous en avons relevé ci-dessus une double preuve ; car tantôt ils prennent à tâche de torturer la Formule de la production en série conditionnée pour lui instiller la généralité abstraite et la rigueur logique qui lui font par trop visiblement défaut ; et tantôt, pour sauver le dogme de l'Omniscience de leur Maître, ils ne trouvent d'autre expédient que de prétendre qu'il a volontairement restreint le nombre et la portée de ses instructions. Les libertés qu'ils prennent dans l'interprétation de sa thèse capitale comme la façon embarrassée dont ils excusent ses limitations témoignent bien qu'ils étaient au fond d'accord avec nous pour estimer que, beaucoup plus qu'un philosophe, le. Bouddha a été moraliste.

LE MORALISTE. - Et en effet, ainsi que l'a judicieusement écrit Émile Senart, le bouddhisme est essentiellement « une discipline de moralité ». C'est comme tel que, lors de son apparition dans l'histoire, il inspire les édifiants édits de l'empereur Açoka ; c'est encore comme tel qu'il exerce sur notre temps une action profonde et s'impose dans les deux hémisphères à la respectueuse considération de tous, croyants ou incrédules. C'est enfin ce que les deux primitives corbeilles de son énorme littérature attestent