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0333 La Vie du Bouddha : vol.1
La Vie du Bouddha : vol.1 / Page 333 (Color Image)

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doi: 10.20676/00000286
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CONCLUSIONS   331

bannière d'une religion exotique un genre de vie aussi antisocial et (qui pis est, par ces temps mercantiles) aussi «anti-économique » que celui de moine mendiant. Et qu'on ne vienne pas dire que pour être un vrai bouddhiste, il n'est pas nécessaire de se faire bhikshou et qu'un fidèle laïque peut fort bien adhérer totalement à la doctrine sans renoncer pour cela à la vie mondaine. Il peut certes le dire et même le croire (car, en tant qu'animal religieux, l'homme n'est jamais à une contradiction près), mais non sans se mettre intellectuellement dans une position intenable et par chacun de ses actes démentir ce que professent ses lèvres. Car qui persisterait en bonne logique à participer à l'activité d'un monde que, selon la juste et frappante expression de Th. Tscherbatsky, sa doctrine transforme en un « cinéma » — un cinéma continu, mais où rien, ni la salle, ni l'écran lumineux, ni les images qui sans cesse y défilent, l'une chassant l'autre, n'ont de consistance réelle ? Et comme le film ne déroule perpétuellement que fausses joies payées de trop réelles souffrances et tremblantes vies constamment fauchées par la mort, la seule démarche rationnelle pour quiconque en a compris l'incurable et douloureuse vanité est celle du spectateur écoeuré autant qu'horrifié qui, prenant en pitié ceux qui communient avec un tel spectacle, ne songe qu'à gagner la sortie pour retrouver la paix dans l'obscurité de la nuit.

Nous nous gardons de l'oublier : le métier du philologue n'est pas de peser les mérites respectifs des religions ni surtout de fonder la louange de telle d'entre elles sur le mépris de telle autre : mais le respect de la vérité historique est la loi de sa conscience professionnelle ; et ce souci d'exactitude justifie les remarques que l'on vient de lire. Jamais peut-être elles n'ont été moins oiseuses. Dans l'Europe meurtrie et avilie parses périodiques accès de fureur guerrière dont dix-neuf siècles de christianisme n'ont pas réussi à la guérir, beaucoup d'âmes désemparées se tournent de nouveau vers la lumière qui vient de l'Orient ; et, de son côté, l'Asie réveillée et méprisante se sent plus que jamais capable de nous faire à nouveau la leçon. Travaillée sans grand succès depuis tantôt quatre siècles par nos missionnaires chrétiens, elle estime qu'elle est en droit de nous rendre la pareille. Que ce soit son droit, qui pourrait le contester ? Reste à examiner la manière dont elle l'exerce. Or les tracts de propagande et les propagandistes qu'elle nous envoie et se propose de nous envoyer en nombre toujours croissant nous présentent avec trop d'adresse un bouddhisme adapté au goût européen et travesti à la moderne. Prenant avantage de la liberté d'esprit, du prudent agnosticisme et du sens moral de Çâkya inouni, ils font miroiter à nos yeux, comme qualités caractéristiques de sa doctrine, l'absence de cérémonial, de pratiques rituelles, de « papisme », d'obscurantisme, et en général de tout mystère inaccessible à la raison : sur quoi ils concluent triomphalement qu'en chargeant chacun de nous d'être l'artisan de son propre salut sans aucune inter-