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Documents sur les Tou-kiue (Turcs) occidentaux : vol.1 |
302 EDOUARD CHAVANNES.
Vers la même époque, Mahomet, mort en 632, fondait une religion
nouvelle qui n'allait pas tarder à entrer en conflit avec celles qui l'avaient
précédée. D'une autre manière, les Turcs occidentaux favorisèrent aussi
son essor. Au début de leur carrière, ils s'étaient joints aux Perses pour
triompher des Hephthalites entre 563 et 567; mais, si les rois de Perse
avaient pu d'abord retirer quelque profit d'une alliance qui leur avait
donné la frontière de l'Oxus, ils ne tardèrent pas à s'apercevoir qu'ils
avaient conclu un marché de dupes; les Turcs, dès qu'ils furent leurs voi-
sins, devinrent leurs pires ennemis; ils attisèrent la vieille inimitié de By-
zance contre Ctésiphon et profitèrent du conflit durable qu'ils avaient ainsi
fait naître pour s'approprier toutes les principautés échelonnées de l'Oxus
à l'Indus. Or cet affaiblissement de la Perse se trouva être la cause princi-
pale des rapides progrès de l'Islam; le triomphe des Arabes fut en définitive
préparé et rendu possible par l'ébranlement que les attaques combinées des
Turcs et des Romains avaient imprimé à la vieille monarchie Sassanide.
A l'apogée de leur puissance, les Turcs occidentaux auraient pu op-
poser aux envahisseurs venus de l'Arabie un obstacle infranchissable. Mais
ils ne survécurent pas longtemps eux-mêmes aux Sassanides. Ise dernier
représentant de cette dynastie qui ait effectivement régné, Yezdegerd, était
mort en 651. ou 652; or, de 657 à 659, les Chinois remportèrent des vic-
toires décisives qui abattirent pour toujours la puissance des Dix Tribus.
Cet événement profita encore aux Arabes. En vain la Chine prétendit-elle
gouverner elle-même l'empire turc et y établir son administration; elle
n'était pas assez forte pour mener à bien une tâche aussi vaste. Ce furent
en_ définitive les Arabes qui, du moins jusqu'à l'Yaxartes, furent les véri-
tables héritiers des Turcs occidentaux, comme ils l'avaient été précédem-
-mēē des- rois dé Pérsë:
Il fallut cependant encore près d'un siècle aux Arabes pour absorber
ia_Thansoxane et le Tokharestan... Pendant ces cent années, les relations
diplomatiques provoquées par la nécessité où se trouvaient les pays d'Oc-
cident. de chercher en Chine un secours contre les Arabes, continuèrent
l'oeuvre qui s'accomplissait naguère par l'initiative privée des commerçants
et des pélerins. Aussi cette période n'a-t-elle guère moins d'importance
dans l'histoire du mouvement des idées que celle qui l'a précédée. En 677,
le prétendant au trône Sassanide, Pîroûz, pourchassé par les Arabes, vint
se réfugier à Tch'ang-ngan et obtint l'autorisation d'y établir un temple
persan, c'est-à-dire sans doute un temple consacré au culte du feu 1). En
719, l'astronome Ta -mou - che, prêtre d'une religion qui paraît être le
1) Cf. p. 258, lignes 1-7.
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